Protonthérapie : face à Montpellier, Toulouse crée un comité de lobbying

Opération de lobbying pour les acteurs de la santé et de la lutte contre le cancer à Toulouse. Un comité Toulouse Excellence Santé est créé pour obtenir l'implantation d'un centre de protonthérapie, un équipement de 40 millions d'euros qui fera l'objet d'un appel d'offres de l'État d'ici à la fin de l'année. Toulouse et Montpellier sont en compétition. Un tableau qui compare les deux villes en matière de santé pourrait faire grincer des dents à Montpellier. Le Forum Santé Innovation du 25 septembre à Toulouse sera l'occasion d'évoquer les enjeux du secteur santé dans la nouvelle grande région.
Un scanner de l'Oncopole de Toulouse

Toulouse Excellence Santé vient de voir le jour à Toulouse. Ce comité, composé d'experts de la santé, est coordonné par le professeur Bernard Fraysse, chef du pôle céphalique et professeur des universités, praticien hospitalier en ORL au CHU de Toulouse. Dans la course à la protonthérapie, Toulouse avance ainsi ses arguments.

Pour rappel, la protonthérapie est une technique encore très rare en France, qui permet de soigner de manière plus ciblée certains cancers, notamment chez l'enfant. Mais elle a aussi de nombreuses applications dans le domaine du spatial, des systèmes embarqués et de l'automobile.

Dans le cadre du plan Cancer 2014-2019, l'État affiche sa volonté d'implanter 5 à 6 centres supplémentaires en France (seules Paris et Nice en sont dotées actuellement). Dans le cadre d'un appel d'offres qui pourrait être lancé d'ici fin 2015, Toulouse et Montpellier seront en compétition. Nantes et Bordeaux pourraient également se porter candidates. Mais déjà plusieurs professionnels laissent entendre que Montpellier serait favorite, pour "compenser" le fait que Toulouse soit la future capitale de la grande région Languedoc-Roussillon Midi-Pyrénées. Les services de l'État ont d'ailleurs décidé le 31 juillet que la future ARS (agence régionale de santé) serait implantée à Montpellier. À Toulouse, la mobilisation s'organise.

Toulouse Excellence Santé, un outil de lobbying

Le comité Toulouse Excellence Santé vise précisément à ce que les intérêts politiques (liés à la réforme territoriale) n'interfèrent pas dans le choix de la ville qui accueillera le centre de protonthérapie. Composé de "plus de cents acteurs médecins publics et privés, chercheurs, industriels de Toulouse et des huit départements de Midi-Pyrénées", le comité pourrait voir des startups et des industriels hors santé le rejoindre dans les semaines à venir. Pour l'instant il regroupe surtout le secteur public et les grandes cliniques privées toulousaines. Ce comité est coordonné par le professeur Bernard Fraysse :

"Nous souhaitons que si de grandes décisions sont prises demain par l'État concernant l'installation d'équipements innovants dans le grand sud, par exemple concernant la protonthérapie, ces décisions soient prises à partir d'éléments factuels et non pas à partir d'intérêts politiques !"

Plusieurs industriels régionaux, du spatial et de l'automobile notamment, voient leur intérêt dans cette éventuelle implantation toulousaine. Ainsi, pas question pour les acteurs de la santé toulousains de céder à l'argument de la répartition des secteurs économiques entre Toulouse et Montpellier :

"Nous ne voulons pas entendre dire que Toulouse vit uniquement de l'aéronautique, et Montpellier de la santé. Nous voulons entendre dire que Toulouse est autant en pointe dans l'aéronautique que dans la santé, et que Montpellier est également en pointe dans la santé", conclut Bernard Fraysse.

Parmi les premières actions que Toulouse Excellence Santé entend conduire figure "l'inventaire exhaustif des compétences et du positionnement national et international par disciplines au sein des établissements publics et privés de Midi-Pyrénées". Il sera engagé dans les prochaines semaines et communiqué aux instances compétentes et aux élus régionaux.

Le comité organise également le 2 octobre prochain à Toulouse, une réunion ayant pour thème : "Des technologies innovantes en santé : quel partenariat pour réussir ?". Il y sera débattu du développement de l'innovation en santé et des collaborations existantes entre les équipes de chercheurs et le tissu industriel régional.

Par ailleurs, afin de mettre en avant les atouts et les perspectives de la filière santé locale et d'expliquer l'enjeu de la compétition internationale et de la rivalité Toulouse / Montpellier, La Tribune ObjectifNews organise le 25 septembre le 1er forum santé Innovation ( inscription ici).

Pas encore d'appel d'offres

L'appel d'offres de l'État concernant le centre de protonthérapie n'a pas encore été lancé. Le CHU de Toulouse a envoyé cette semaine une lettre au préfet de Haute-Garonne pour obtenir des éléments de calendrier et de modalités sur cet appel d'offres, déplorant avoir "peu d'informations". Jacques Léglise, le directeur du CHU de Toulouse, pense que "des décisions seront prises après les régionales" et plusieurs proches du dossiers estiment que l'appel d'offres sera lancé fin 2015. La préfecture précise uniquement : "Nous avons bien reçu ce courrier et nous y répondrons en lien avec le ministère des Affaires sociales."

Le tableau Excel qui compare les deux régions

Que ce soit à Toulouse où à Montpellier, élus ou chercheurs, il y a unanimité sur un point : "il ne faut pas rentrer dans une compétition stérile entre les deux métropoles." Dans les couloirs de l'Oncopole, on s'agace même "de l'attitude des collègues de Montpellier, qui sont sans arrêt dans la comparaison".

Plusieurs proches du dossier se sont néanmoins prêtés à l'exercice de la comparaison et ont dressé un tableau comparatif précis entre Toulouse et Montpellier,  basé sur les données du classement du Point sur les meilleurs établissements de santé (paru en août 2015).

Dans ce tableau sont recensées les spécialités médicales (cancérologie, cardiologie, neurochirurgie, etc. : 16 au total). Y figurent également les pathologies. Pour la seule spécialité cancérologie, 15 pathologies sont recensées : cancer du sein, du colon, de la vessie, leucémie, etc.

Pour chaque ligne, il a été déterminé si Toulouse et Montpellier font partie du top 10 national, du top 20, ou si elles se situent au-delà du top 20.

Pour chaque ligne également, le meilleur établissement de la future région est surligné en vert.

Par exemple, pour le cancer du rein (ligne 8), le CHU de Montpellier est classé 16e au niveau national (top 20), le CHU de Nîmes est classé 26e (pas dans le top 20), le CHU de Toulouse est classé 4e (top 10). Par conséquent, c'est ce dernier qui est souligné en vert et considéré comme "le 1er régional".

 "On voit bien que sur ce tableau, Toulouse est beaucoup plus en vert que Montpellier", soufflent certains spécialistes du dossier.

 Voici un extrait du tableau, qui concerne la cancérologie :

cancerologie

 La légende :

cancerologie

Présent hier (16 septembre) au forum économique de la CCI 31 à Toulouse, le préfet de Midi-Pyrénées Pascal Mailhos a déclaré : "En matière d'oncologie, Toulouse et Montpellier doivent collaborer, plutôt que de s'opposer sur des appels à projets."

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Commentaires 3
à écrit le 19/09/2015 à 9:20
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Si l'on ne voulait pas de compétition stérile entre Toulouse et Montpellier, il ne fallait pas faire cette réforme ! Il est assez cynique de voir comment les socialistes dénoncent la compétition entre entreprises depuis des décennies et appliquent fi...

à écrit le 18/09/2015 à 14:53
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QUELLE tristesse,on va encore s'Acheminer à 1 guerrere de chefs Politiques encore des Depenses payèes par nos IMPOTS et du retard dans la Decision pour le Corps MEDICAL

à écrit le 18/09/2015 à 11:29
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" Dans les couloirs de l'Oncopole, on s'agace même "de l'attitude des collègues de Montpellier, qui sont sans arrêt dans la comparaison"... Mais qui a fait ce tableau de comparaison? Ceux qui ne cherchent pas à se comparer? Quelle ironie tout de mêm...

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