À Toulouse, étudiants et chercheurs conçoivent leur campus intelligent

Pendant les vacances de Pâques, trois salles de cours de l'Irit à Toulouse seront équipées de caméras et de capteurs de température ou de luminosité. Initié en 2013 et regroupant 10 laboratoires, le programme neOCampus a pour vocation de créer un campus intelligent alliant qualité de vie et économies d'énergie. Une initiative saluée par le CNRS qui vient d'allouer près de 100 000 euros au programme.
Marie-Pierre Gleizes, chargée de la mission neOCampus entourée de doctorants toulousains participant au projet.

Avec 36 000 usagers et 407 000 m2 de superficie, le campus de l'université Paul Sabatier rivalise à lui seul avec une ville moyenne comme Périgueux. "C'est une véritable petite commune avec des transports en commun, des logements (les cités U), un restaurant universitaire, des salles de cours, des laboratoires et même une crèche", note Marie-Pierre Gleizes, chargée de mission pour le programme neOCampus. Il y a trois ans, cette professeure propose, avec quelques collègues, au président de l'université (c'était alors Bertrand Monthubert) de transformer le campus en démonstrateur à grande échelle, étudiants et chercheurs pouvant tester in vivo leurs sujets de recherche. Objectif : créer un campus intelligent qui permet de réaliser des économies d'énergies et de réduire l'empreinte écologique des bâtiments tout en améliorant la qualité de vie sur le site.

"Tester dans la vraie vie les projets de recherche"

Cette initiative donne lieu en juin 2013 au lancement du programme neOCampus et l'équipement d'une première salle de cours avec des capteurs et des caméras. Aujourd'hui, neOCampus regroupe 10 laboratoires de l'université avec aussi bien des informaticiens que des énergéticiens, des physiciens, des écologues ou des juristes. Le programme vient surtout de taper dans l'œil du CNRS, qui a décidé de soutenir le projet à hauteur de 97 000 euros avec des partenariats avec les universités de Grenoble et Nice.

irit

Des capteurs sont installés dans les salles de cours (Crédits: Rémi Benoit).

Ce financement va permettre d'équiper trois salles de cours supplémentaires : "Nous allons y installer des caméras et une dizaine de capteurs (température, luminosité mais aussi sur les prises électriques). Nous sommes également en train de créer une plateforme hybride avec la simulation de la salle de cours en 3D et une maquette physique représentant la pièce", détaille Marie-Pierre Gleizes. Les étudiants sont des cobayes de recherche mais peuvent aussi proposer des expérimentations. Ainsi, depuis le 1er février, une dizaine d'élèves de master et 13 thésards réfléchissent à l'analyse des données énergétiques du campus, à l'interaction homme-machine ou modélisent un bâtiment intelligent. Jérémy Boes, en post-doctorat à l'Irit, est chargé par exemple de concevoir la plateforme de simulation hybride. En 3e année de doctorat, Angel Barroso teste des Led "qui consomment deux fois moins d'énergie que les produits actuellement sur le marché" et Inès de Courchelle (2e année de thèse) cherche de son côté à utiliser des panneaux solaires pour alimenter les data centers.

"L'idée est de tester dans la vraie vie les projets, complète la responsable du programme neOCampus. On amène la recherche dans les salles de cours mais les étudiants ne sauront pas forcément les effets recherchés par le projet. Donc, nous aurons des vraies réactions d'utilisateurs. L'autre intérêt est de pouvoir faire de la recherche à grande échelle. Bien souvent, quand on a dix capteurs, on sait faire, mais avec un millier cela pose plus de problèmes à cause de la problématique du big data".

Grâce à ce programme, l'université espère aussi nouer des partenariats avec les industriels : "On se rend compte que les TPE, les startups, n'ont pas toujours les moyens de tester à grande échelle leurs innovations. Nous sommes en discussion avec trois industriels (FM Lighthouse, Carré products et Sunibrain) qui pourraient mettre à disposition du matériel et nouer avec nous des projets collaboratifs", poursuit-elle.

À terme, le programme neOCampus espère installer des capteurs à l'intérieur mais aussi à l'extérieur des bâtiments pour transformer l'ensemble du campus en terrain d'expérimentation. Alors qu'un nouveau bâtiment est en construction, les architectes ont laissé un des pans de murs vides, pour permettre des recherches sur de nouveaux matériaux. Billy Seng, doctorant en 2e année va ainsi pouvoir se servir des murs de la salle des professeurs pour y tester un béton à base de chanvre. "C'est une vraie opportunité de pouvoir faire nos recherches avec de vrais occupants, en situation réelle", se félicite-t-il.

irit

Billy Seng planche sur des constructions en béton de chanvre (Crédits : Rémi Benoit).

À l'Université Paul-Sabatier, l'initiative séduit. Les étudiants sont très nombreux à vouloir intégrer le programme neOCampus. "On a même dû refuser des demandes de stage", explique l'établissement. Pour le directeur de l'Irit Michel Daydé, "cette dynamique montre que le programme s'inscrit pleinement dans les sujets sociaux, économiques et environnementaux de notre temps".
L'autre atout du programme est de miser sur la transversalité entre les disciplines. Magali Gerino, membre du laboratoire d'écologie, a ainsi remporté un prix pour un projet de science participative mené avec des informaticiens de l'Irit : "Nous avons mis au point une application BiodiverCity. Grâce à un système de QR code, il est possible de prendre en photo une plante avec un smartphone, d'envoyer les données au labo pour réaliser un inventaire de la biodiversité sur le campus. Ce projet n'aurait jamais pu voir le jour sans la collaboration entre les deux labos." Et l'application toulousaine devrait bientôt être déployées à l'échelle nationale sur d'autres campus.

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.