La Chine et les robots coopératifs, les deux piliers du marché de la robotique industrielle

Ancien président de la Fédération internationale de la robotique (IFR), Arturo Baroncelli a remporté le prix Engelberger (l'une des plus hautes récompenses en robotique) en 2005. Cet ingénieur mécanique, qui travaille dans la robotique depuis 30 ans, est actuellement chargé du développement des affaires pour Comau Robotics, l'un des principaux constructeurs de robots industriels dans le monde. Intervenant à l'événement Emtech France à Toulouse en décembre dernier, ce spécialiste du marché des robots industriels prévoit une croissance forte basée sur le marché chinois et les robots coopératifs.
Arturo Baroncelli

Quelle place occupent les robots dans l'industrie ?
Le marché des robots industriels représente 230 000 unités l'an dernier, dont 52 000 sont concentrés en Chine. Ensuite viennent le Japon, la Corée, les États-Unis, l'Allemagne, la Thaïlande et l'Italie. À l'avenir, une croissance à deux chiffres est prévue pour l'industrie robotique.

Sur quoi se base cette croissance ?
Elle est basée sur un pilier géographique et un pilier technologique. La densité robotique correspond au nombre de robots utilisés dans l'industrie pour 10 000 salariés. Dans le monde, elle est de 68. Elle est de 116 aux États-Unis et dépasse les 200 au Japon. À côté de cela, la densité robotique chinoise est seulement de 30. Avec un nombre si bas, la Chine ne peut qu'augmenter sa densité robotique à l'avenir. J'étais à Beijin en novembre 2015. Le vice-président chinois a dit que la robotique était les joyaux de la couronne de l'industrie chinoise et que son objectif était de développer le secteur. Le second pilier, technologique, est lié à l'émergence des robots coopératifs. Pour l'instant, 99 % des robots sont immobiles et enfermés dans des cages pour des raisons de sécurité. Les progrès technologiques permettent à présent de concevoir des robots pouvant se déplacer. Bien qu'ils soient plus faciles à utiliser, ils ont deux limites : leur petite taille actuelle et les risques liés à leur utilisation. Des analyses de risques doivent être réalisées pour évaluer les dangers liés aux robots coopératifs et aux outils qu'ils utilisent.

Qu'en est-il des robots non industriels ?
Depuis les années 90, il y a aussi les robots de services qui se divisent en deux branches : les robots d'assistance personnelle (pour les personnes âgées par exemple) et ceux plus professionnels comme pour la chirurgie, la traite du lait, etc. Là encore, une croissance à deux chiffres est attendue. Cela commence presque de zéro. Cela n'est pas tout à fait nouveau, mais cela part de plus loin que les robots industriels. Ce qui est intéressant, c'est que les robots industriels et de services se rejoignent. Un robot industriel doit avoir un système très productif, être peu couteux et fiable. Les robots de services intègrent de nouveaux systèmes d'intelligence artificielle. Le rapprochement des deux est un moment important pour le développement de la robotique.

Les robots vont-ils supprimer des emplois ?
Je suis toujours interrogé sur cette question et ma réponse est non. Dans de nombreux cas, les robots ne sont pas un outil parmi d'autres pour accomplir une tache, mais l'unique outil existant car certaines taches requièrent une force qui dépasse les capacités humaines. La robotique permet de réaliser des activités qui n'existaient pas auparavant. On ne peut pas par exemple imprimer des cartes informatiques sans robots, pour une question de précision et de qualité. Les robots doivent faire les choses ennuyeuses que les humains n'aiment pas faire. Fin de l'histoire. Le meilleur exemple m'a été donné récemment par un entrepreneur américain. 'Je peux faire un produit, m'a-t-il dit, grâce à des systèmes robotiques, ou décider de ne rien faire, car les robots sont la seule solution. Grâce à cela, j'ai pu embaucher une secrétaire, un commercial, nourrir ma famille, etc.' Il faut voir les robots comme des outils pour produire des choses et comme un moyen de créer de la richesse. Voilà ma réponse.

La robotisation de l'industrie est-elle la seule solution pour que l'industrie européenne reste compétitive ?
Absolument. On ne peut concurrencer des pays où les salaires sont moins élevés qu'ici. La seule façon est d'augmenter la valeur ajoutée grâce à des systèmes automatiques plus flexibles, afin de faire revenir la production en Europe. Barack Obama a beaucoup insisté là-dessus aux États-Unis. Il est difficile de juger quand ce rééquilibrage de la production aura lieu car les dynamiques sont très variables. Mais quoi qu'il en soit, la robotique est un outil fantastique de développement. Elle réunit la mécanique, l'électronique, les logiciels, l'intelligence artificielle, mais aussi la médecine, les neurosciences, ainsi que des questions éthiques et légales.

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