La biscuiterie Poult vise 1 milliard d'euros de CA. Interview de son président Carlos Verkaeren

Carlos Verkaeren, président du Groupe Poult (biscuiterie) basé à Montauban, a reçu le 17 décembre le Grand Prix du Décideur de l'année décerné par Objectif News. A 48 ans, cet ancien directeur de participation parisien est à la tête d'un groupe au CA de 230 M€. Une réussite qui n'a rien d'un long fleuve tranquille, même si aujourd'hui de par son management, sa stratégie d'innovation et ses résultats, l'entreprise fait figure de modèle. Interview.

Le Groupe Poult possède 5 sites de production en France, et produit 330 millions de paquets de biscuits, qui sont vos clients ?
Nous travaillons pour la grande distribution: Carrefour, Leclerc, Système U, Intermarché ou encore Auchan. Il n'y a pas une grande surface en France qui ne propose pas de biscuits Poult. La grande distribution en France a la réputation d'être dure en négociations. Nous avons des contrats d'un an, qui peuvent cesser d'un coup ou être renouvelés sur le long terme. 5 ou 6 clients représentent 80 % de notre chiffre d'affaires, c'est le risque. Cependant, malgré une baisse de la consommation dans la grande distribution, Poult continue de gagner des parts de marché.

Quels sont vos projets pour l'entreprise ?
Nous avons des projets importants de croissance externe. Le marché du biscuit en Europe est très atomisé. Il compte globalement 2 000 entreprises, essentiellement familiales, et a vocation à être rationalisé. Nous pesons aujourd'hui 230 millions d'euros mais nous pouvons réaliser 1 milliard d'euros dans 10 ans. Par ailleurs, en Pologne, l'un des pays européens les plus porteurs économiquement, nous visons la place de numéro 1.

Quelle est la politique en matière d'innovation ?

Dans l'inconscient collectif, les marques distributeurs ne font qu'imiter les grandes marques et pendant plusieurs années c'est ce que nous faisions chez Poult. Désormais nous développons nos propres produits. Dans les années 2000, 80 % de nos produits étaient issus de commandes des distributeurs, aujourd'hui la tendance s'inverse, c'est nous qui proposons nos produits. Nous partons du principe qu'il faut pousser tous les feux de l'innovation et multiplier les initiatives puisque l'on ne sait pas a priori laquelle aura le meilleur résultat. Depuis deux ans, nous avons 30 coachs en innovation et nous avons développé un incubateur interne. Si quelqu'un a une idée innovante, qu'il soit ouvrier ou cadre, il peut y consacrer 50 % de son temps. En ce moment, vous pouvez trouver en magasin des cookies avec un cœur fondant en chocolat qui sont une innovation signée Poult. Par ailleurs, nous avons identifié 5 start-up avec lesquelles nous travaillons en partenariat et nous participons à un projet de recherche qui est en cours de labellisation avec le pôle de compétitivité AgriMip Innovation.

Votre management fait partie intégrante de votre stratégie, comment s'organise-t-il ?
Deux échelons hiérarchiques ont complètement disparu et cela a libéré beaucoup d'énergies et de créativité en interne. Les notions de liberté et d'autonomie ont pris beaucoup d'importance. Désormais, les équipes de production gèrent elles-mêmes leurs emplois du temps ou les contrôles qualité. Je suis convaincu que lorsque l'on donne suffisamment de liberté et de reconnaissance à un individu, ce dernier peut donner le meilleur de lui-même. Par ailleurs, chacun au sein de l'entreprise est encouragé à innover. Bien sûr il y a des personnes à qui ce genre de liberté ne convient pas, ce n'est pas le monde des « Bisounours ». Mais nous n'avons pas connu de conflit social depuis 8 ans. Les représentants syndicaux sont dans le dialogue. Je pense que le clivage patron / salariés est d'un autre monde, surtout quand le patron est lui même salarié, et pas actionnaire. Pour moi, l'innovation managériale est l'avantage concurrentiel ultime.

Comment gérer le ratio qualité des produits / coût quand on travaille pur la grande distribution ?
L'aspect coût est important mais cela ne veut pas dire que nous utilisions des matières premières de mauvaise qualité. Qu'il s'agisse du sucre ou du chocolat, nous avons les mêmes fournisseurs que les marques classiques ! Pour le bio en revanche, les coûts sont plus élevés de 30 à 40 % car l'approvisionnement en matière première engendre des dépenses plus élevées. Nous fournissons notamment la marque Bjorg. Ces produits sont vendus 30 à 50 % plus cher en magasins.

Est-ce que Poult utilise de l'huile de palme dans ses produits ?

La France est le seul pays d'Europe qui fait un tel scandale autour de l'huile de palme. Le problème vient de la déforestation en Indonésie, certes, mais pas de ses effets néfastes sur la santé. Sur ce sujet il y a autant d'avis que d'experts. Nous utilisons de l'huile de palme car elle a des propriétés gustatives intéressantes, elle facilite le process de cuisson et c'est une matière grasse moins chère que le beurre. Ceci dit, nous avons la capacité de tout produire sans huile de palme, même s'il n'y a pas de demande particulière de nos clients.


Propos recueillis par Sophie Arutunian
© Rémi Benoit

En savoir plus :
L'interview de Carlos Verkaeren a été réalisée par Emmanuelle Durand-Rodriguez ( Objectif News) et Pierre Dreux ( ESC Toulouse) lors de la Matinale Objectif News le 20 décembre 2012 au Casino Théâtre Barrière de Toulouse.

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