Occitanie : un an après, les administrations ont-elles trouvé leur équilibre ?

Un an après la naissance officielle de la nouvelle Région Occitanie, la reconfiguration administrative bat son plein à de nombreux niveaux. Sur ce nouveau territoire très étendu, les acteurs publics s'efforcent de trouver le bon équilibre entre rapprochements, répartition des tâches, nouvelles missions, co-construction, partage de savoir-faire et fusions de certaines entités.
La préfecture de Toulouse, où travaille le préfet d'Occitanie

Trois fois par semaine, matin et soir, devant les hôtels de Région, un petit bus attend. Il s'agit de la navette mise en place entre Toulouse et Montpellier, pour les fonctionnaires de la collectivité territoriale amenés à rencontrer leurs collègues, dans la journée. Au-delà de l'anecdote, le challenge est bien là : il s'agit de rapprocher les hommes.

Un territoire, un nom, une capitale

Deuxième région française par sa superficie, l'Occitanie compte 13 départements aux caractéristiques très différentes. Du piémont pyrénéen à celui des Cévennes, de la Gascogne à la façade littorale méditerranéenne, la diversité est autant géographique que physique, et même culturelle. Logiquement, la proximité et l'équilibre des territoires sont au centre des problématiques pour assurer le bon fonctionnement de ce nouvel ensemble, qui a connu ces derniers mois des avancées décisives.

Le décret n° 2016-1264 du 28 septembre dernier a notamment permis de trancher définitivement le nom et le chef-lieu de la nouvelle région. Il clôt les discussions nombreuses, d'abord autour du choix de la capitale, en 2015, puis autour du nouveau nom, au premier semestre 2016. Le choix de la consultation citoyenne, par internet, autour de 5 noms présélectionnés par un comité de personnalités, puis celui arrivé en tête mis au vote au Conseil régional, en juin 2016, a suscité le débat et bien des frustrations. Après Languedoc-Roussillon-Midi-Pyrénées, nom transitoire, c'est donc Occitanie qui a été finalement retenu, mais dans l'usage, les élus y accolent la mention Pyrénées-Méditerranée. Quant à la capitale, Toulouse a d'abord été celle transitoire, avant de s'imposer définitivement. Cela ne signifie pourtant pas que la Ville rose ait une main mise sur tous les pouvoirs et les centres de décisions.

Des services de l'État en réseau

Dès la loi promulguée sur la réorganisation administrative et les nouvelles grandes régions, les services déconcentrés de l'État et les Établissements publics régionaux s'étaient mis en mouvement. La phase actuelle est encore qualifiée de "transitoire", du côté de la Préfecture de Région. Le principe suivi depuis le début a consisté à maintenir la proportion existante des effectifs de l'État entre Montpellier et Toulouse (45 % / 55 %). L'objectif est "atteint", dixit la Préfecture, avec environ 2 200 fonctionnaires régionaux dans les administrations à Toulouse et 1 800 à Montpellier. Quant à la localisation des sièges des directions, leur réorganisation et leur articulation territoriale dans les départements, tout est en cours de déploiement.

L'organisation des cinq directions majeures (Direccte, Dreal, Draaf, DRJSCS, Drac) est basée sur un système de deux sites spécialisés, qui comprendra à terme une vingtaine de pôles métiers, répartis à parité entre Toulouse et Montpellier. Le directeur régional des Affaires culturelles et le directeur régional de la Jeunesse, des sports et de la cohésion sociale sont localisés à Montpellier. Le directeur régional des Entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi, le directeur régional de l'Alimentation de l'agriculture et de la forêt  et le directeur régional de l'Environnement, de l'aménagement et du logement sont quant à eux localisés à Toulouse.

Mais il existe aussi des "exceptions". L'Agence régionale de la santé (ARS) est ainsi localisée à Montpellier mais garde un site toulousain "de taille identique". Le gouvernement a par ailleurs instauré un recteur de région, celui de Montpellier, mais la grande région conservera ses deux rectorats. À l'inverse, la Direction régionale des finances publiques (DRFIP) et le Secrétariat général aux affaires régionales (SGAR) sont organisés en mono-site, à Toulouse.

La priorité des acteurs de l'État est désormais "d'adapter la voilure", en poussant au travail en réseau avec le niveau départemental. Ce niveau d'intervention va être renforcé par "l'augmentation de la polyvalence des unités départementales de la Direccte, de la Drac et de la Dreal". Cela passe par quelques effectifs supplémentaires (non chiffrés encore) et par le renforcement des Directions départementales des territoires (DDT) et des Direction départementale de la cohésion sociale (DDCS), par transfert de missions notamment.

Les mues des opérateurs publics

Concernant les opérateurs publics nationaux ayant des établissements en Occitanie, plusieurs choix sont actés ou envisagés : la Chambre régionale des comptes et le Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM) auront leur siège à Montpellier (et probablement l'Agence nationale de la biodiversité), Pôle emploi, l'Institut national des statistiques et des études économiques (Insee) et l'Agence de l'environnement de la maîtrise de l'énergie (Ademe) à Toulouse, tandis que l'Agence des services et des paiements aura son siège à Nîmes. Pour les autres opérateurs publics, comme SNCF Réseau et SNCF Mobilité, l'Urssaf ou encore la Carsat, leurs entités existantes restent compétentes sur chacune des anciennes régions pour le moment, sans évolution envisagée à court terme. D'autres réfléchissent, tels l'Office national des forêts (ONF) ou l'Institut national de recherche archéologique préventive (Inrap), afin d'adapter le périmètre de leurs établissements locaux à la nouvelle géographie régionale.

D'autres enfin ont opéré leur mue (planifiée), à l'image de la fusion des Chambres de commerce et d'industrie de région (CCIR) et des Chambres régionales de l'économie sociale et solidaire (Cress).

Plus largement, dans de nombreuses organisations professionnelles, à l'image des chambres d'agricultures, chambres des métiers, en passant par le Medef, la CGPME et de très nombreuses autres fédérations, la réorganisation bat aussi son plein, oscillant entre simple rapprochement et véritable fusion.

Conseil régional : transversalité et proximité

Du côté de la collectivité régionale, c'est à un nouveau périmètre et de nouvelles compétences que l'on doit s'adapter. La nouvelle organisation de l'administration régionale, forte de 6 634 agents, ne répond quant à elle pas du tout à une "répartition entre un site ou un autre, mais un réel équilibre qui répond à 4 principes ", dixit l'exécutif régional. Elle se veut "l'incarnation des grands axes du projet de la collectivité, plus innovante et transversale, plus efficace, humaine et juste, en préservant les agents et les logiques de sites".

Dans le détail, les 44 directions antérieures ont été réduites à 30 aujourd'hui. Celles-ci sont multi-sites, dans un souci "d'équilibre et de proximité" optimale. Une inspection générale des services a également été créée. L'organisation ne touche pas aux logiques de sites, en suivant par exemple un strict équilibre dans la nomination des directrices et directeurs, à part égale issus de Toulouse et de Montpellier (15/15). La mobilité des personnels est encouragée, mais non contraignante. Deux directions des ressources humaines ont par ailleurs été maintenues. Le rapprochement des personnels et des services sont également facilités (navette bus, visioconférence) dans le travail quotidien.

Au niveau des réunions décisionnelles des élus, l'ensemble des assemblées plénières et commissions permanentes du Conseil régional d'Occitanie se tiennent à Montpellier. Les commissions sectorielles se réunissent par alternance, tous les mois, une fois à Montpellier et la fois suivante à Toulouse. La solution de la location de salle pour les assemblées mensuelles va être poursuivie, au regard du coût de l'agrandissement et de la remise aux normes techniques envisagés initialement dans les deux salles d'assemblées existantes. L'achat d'un bâtiment ne semble pas envisagé à court terme. Lors de l'assemblée plénière du 28 novembre, la présidente Carole Delga a indiqué que la recherche d'un bâtiment n'était pas une priorité :

"Notre priorité, c'est d'investir pour les citoyens et les territoires, pas de construire ou reconstruire un nouvel hémicycle pour plusieurs sessions par an. Le choix a été vite fait : entre 6 et 12 millions pour un nouvel hémicycle, et les frais d'aménagement d'une salle du Parc Expo de Montpellier dont nous sommes propriétaires, pour 1,5 million d'euros pour l'ensemble du mandat, j'ai choisi. Je veux consacrer chaque euro utile pour les habitants de la Région. C'est ce même choix qui m'a conduit à refuser l'augmentation des indemnités des élus. Dans l'avenir et au regard de l'évolution budgétaire de la collectivité, cette question sera traitée dans le cadre d'une réflexion globale engagée sur notre stratégie immobilière."

Discussions autour des structures satellites

Quant à la réorganisation des structures satellites liées au Conseil régional, la réponse apportée par cette même Région est plutôt laconique : "Ces questions seront traitées au cas par cas, en lien étroit avec chacune des structures concernées." Certaines évolutions, si elles sont "sensibles", sont déjà pourtant bien réelles, à l'image du rapprochement du CarifOref et de son homologue Atouts Métiers. Les Comités régionaux du Tourisme (CRT) ne sont quant à eux officiellement pas encore "réunis", mais on parle déjà d'antenne de Toulouse et d'antenne de Montpellier, avec une présidence unique. À l'échelle européenne, la fusion des représentations a déjà eu lieu, incarnée par la nouvelle structure "Occitanie Europe".

D'autres réorganisations notables, fruit des évolutions issues de la loi NOTRe, vont quant à elles probablement se faire jour, sur le champ des agences de développement.

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