Nanotechnologies : entretien avec Alain Costes

Entretien avec Alain Costes, chargé de mission sur les nanotechnologies par le président de la République. Une réunion d'échanges, organisée par la Commission Nationale Particulière du Débat Public (CNDP) aura lieu mardi 20 octobre. L'occasion de faire le point avec l'ancien directeur du Laas-CNRS sur le projet Nano Innov qui place Toulouse au cœur du développement des nanotechnologies.Quelle est la genèse du centre Nano Innov dont vous avez la charge ?

Entretien avec Alain Costes, chargé de mission sur les nanotechnologies par le président de la République. Une réunion d'échanges, organisée par la Commission Nationale Particulière du Débat Public (CNDP) aura lieu mardi 20 octobre. L'occasion de faire le point avec l'ancien directeur du Laas-CNRS sur le projet Nano Innov qui place Toulouse au cœur du développement des nanotechnologies.

Quelle est la genèse du centre Nano Innov dont vous avez la charge ?

Grenoble, Paris et Toulouse, ont été sélectionnés comme les 3 territoires innovants de dimension mondiale, recouvrant l'ensemble des données des nanotechnologies, et de leur interprétation dans les systèmes complexes. Le président de la République m'a chargé, tout comme Jean Therme (CEA) à Grenoble et Dominique Vernay (Thales) à Paris, de lui faire des propositions sur ce sujet. Le rapport que nous lui avons remis le 14 mars 2009 préconise la création de 3 véritables centres avec des bâtiments dédiés, ouverts au monde économique et industriel, sur les 3 sites.

Pourquoi ouvrir ces centres au monde économique et industriel ?

Alors que la France se positionne parfaitement bien dans les nanosciences avec 6,7% des publications mondiales, on s'est aperçu que l'on était en retard sur le champ de l'application avec seulement 1,8% des brevets mondiaux. L'objectif est donc de faire passer des résultats de la science vers des applications, des produits et services industriels.

D'où le projet Nano Innov ?
Exactement. Nano Innov a été retenu dans le plan de relance du Président pour un montant de 70 millions d'euros. Un appel d'offres de 17 millions d'euros a été lancé en juin auxquels des laboratoires publics et des industriels ont répondu. A Toulouse, bénéficiaire à hauteur de 20% de la somme totale, des sociétés comme Freescale, EADS ou Nano Made ou encore des laboratoires tels que Cirimat ou LPCNO ont été retenus. Les premiers financements ont été débloqués en septembre si bien que les projets tournent déjà.

Pourquoi les nanotechnologies deviennent-elles un sujet central ?
Tout simplement parce que dans une dizaine d'années, la quasi totalité des produits sera faite autour ou avec des nanotechnologies. C'est un marché en pleine expansion dont la France ne peut pas être absente. Une étude indique, par exemple, que près de 11 millions de personnes qui travailleront sur ce secteur dans le monde en 2014 contre 3 millions aujourd'hui. Nous sommes en présence d'une technologie diffusante incroyable : pour retrouver le même impact en terme d'innovation, il faut retourner à l'électricité.

Qu'a-t-elle de si innovant ?
Précisons toute d'abord que les nanotechnologies ne sont pas une invention de l'Homme. La nature est, elle-même, nanométrique. Les premières utilisations humaines remontent aux épées de Damas. La grande innovation réside dans notre capacité à regarder au niveau de l'atome et de la molécule grâce au perfectionnement de l'appareillage, notamment des microscopes. On peut ainsi découvrir le monde nanométrique de la nature.

Quelles peuvent être les applications pratiques ?
Les nanotechnologies ont déjà envahi le système puisqu'on les retrouve dans des milliers de produits, comme dans les raquettes de tennis, les produits dermatologiques, certains vêtements ou les vitres anti-poussières. Le champ d'application est immense, particulièrement dans le domaine de la santé. La présence de nano-particules d'or dans les tests de grossesse améliore, par exemple, leur rapidité et leur fiabilité. On pourra également s'en servir pour mieux traiter les cancers, notamment celui du sein, grâce à l'imagerie moléculaire.

Certaines voix s'élèvent, néanmoins, contre les nanotechnologies. Comportent-elles des risques ?
Comme toute nouvelle technologie, elles ont de bonnes mais aussi de mauvaises applications. Leur utilisation à des fins militaires est la principale. Une confusion est, par ailleurs, faite entre les nanotechnologies et les OGM. C'est une grossière erreur : on donne aux nanotechnologies des propriétés différentes mais on ne les modifie pas.

Le débat public national peut-il permettre de dissiper les malentendus ?
En effet. Je comprends les inquiétudes liées aux nanotechnologies. Cela dépasse, du reste, largement ce cadre là : le XXIème siècle est un siècle de la peur, du chômage, des maladies etc...Il convient, par conséquent, d'expliquer et d'informer le grand public sur la réalité des nanotechnologies. Nous considérons, en outre, nécessaire de mener des actions de formation, dans les collèges et les lycées, pour préparer nos enfants aux technologies de demain.

En savoir plus:

-www.debatpublic-nano.org

- A noter que Lise-Marie Lacroix, chercheure à l'INSA de Toulouse, a reçu le prix de thèse 2009 de la Société Française de Chimie. Ses travaux vont permettre d'optimiser des nano-particules métalliques et magnétiques destinées à soigner les cancers.

En photo : Alain Costes (Crédit photo T.Pons)

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