Le peintre Pierre Soulages a posé, ce mercredi 20 octobre, la première pierre du musée qui lui sera largement consacré à Rodez, à deux pas du lieu où il est né. L'équipement nécessitera un investissement de 21,46 millions d'euros, partagés entre les collectivités et l'État ; 100.000 visiteurs annuels sont attendus. L'ouverture est prévue au premier semestre 2013. Des partenaires privés ont été approchés.

La journée a commencé par un moment d'émotion lorsque Pierre Soulages, accompagné du président du Conseil régional Martin Malvy, du président de la Communauté d'agglomération du Grand Rodez Ludovic Mouly et du maire ruthénois Christian Teyssèdre, a dévoilé une plaque à son nom sur le perron de la maison où il est né, au 4 rue Combarel. Élus et admirateurs du peintre contemporain ont ensuite pris la direction du jardin du Foirail pour les discours, rejoignant notamment Jean-Claude Luche, président du Conseil général de l'Aveyron.

Sous un chapiteau bondé, devant plus de 400 personnes, Christian Teyssèdre a remercié son prédécesseur à la mairie de Rodez, Marc Censi, « sans qui le projet n'aurait pu voir le jour », et a rappelé que cet équipement se place « au cœur de nos ambitions de développement de la ville et de la compétitivité du territoire. Ce musée tirera la ville et l'agglomération par le haut. »

Ludovic Mouly a lui évoqué sa rencontre avec « l'artiste contemporain français le plus renommé du XXe et du XXIe siècle » et insisté sur l'intégration dans le paysage de cet équipement de 6000 m2, conçu par le cabinet catalan d'architectes RCR. Le ministre de la Culture Frédéric Mitterrand étant annoncé mais n'ayant pas pu être présent, il était représenté par la préfète Danièle Polvé-Montmasson, ravie « d'honorer un enfant du pays ». Tout comme Jean-Claude Luche et Martin Malvy, qui a évoqué un « moment d'exception, rare dans ce contexte économique et social difficile », avant que l'artiste, inventeur de l'Outrenoir, ne pose la première pierre du lieu.

Le musée renfermera 500 pièces de l'artiste, 250 œuvres et autant de documents, tous donnés par Pierre Soulages et son épouse Colette à la Communauté d'agglomération du Grand Rodez en 2005. Le public pourra y découvrir des peintures sur toile et papier, dont un ensemble majeur de Brous de noix, des eaux-fortes, lithographies, ainsi que les cartons préparatoires aux vitraux de Conques. L'artiste n'a pas souhaité prononcer de discours ; il s'est néanmoins livré un peu plus tard en conférence de presse. « Ce musée est plus un début qu'un aboutissement : je suis toujours vivant, a-t-il noté avec humour. Cette donation est venue suite à une demande de Marc Censi. J'avais déjà refusé à Georges Frêche (l'ancien député-maire de Montpellier aujourd'hui président de la Région Languedoc-Roussillon) la création d'un musée en mon honneur à Montpellier. Il m'avait proposé l'ancienne mairie, le couvent des Ursulines... J'ai consenti à la création de ce musée à Rodez à la seule condition que 500 m² soient consacrés à des expositions internationales temporaires, que ce lieu soit destiné à d'autres artistes, à d'autres formes d'arts. »

Le budget prévisionnel de ce musée atteint 21,46 millions d'euros. Dans le détail, l'État, le Conseil régional et le Conseil général de l'Aveyron apportent chacun 4 millions d'euros, le reste étant à la charge du Grand Rodez. L'ouverture est prévue au premier semestre 2013 ; 100.000 visiteurs annuels sont espérés dès les premières années. Cet outil de développement économique ne fait toutefois pas l'unanimité : 85 % des lecteurs du quotidien local Centre-Presse ont jugé que le musée ne mérite pas un tel investissement lorsqu'ils ont été interrogés fin 2009.

Dans un communiqué, Jean-Louis Chauzy, président du Conseil économique et sociale régional (et conseil municipal d'opposition à la mairie de Rodez), rappelait hier « qu'en présentant à la presse aveyronnaise, en octobre 2005, le projet de musée dédié à Pierre Soulages, Marc Censi, maire de Rodez et président de la Communauté d'agglomération, annonçait le montant de la facture 10 millions d'euros et la consultation des habitants. » Dénonçant « une dérive des coûts », Jean-Louis Chauzy souhaite, « pour assurer les frais de fonctionnement des trois musées ruthénois, près de 3 millions d'euros par an, la création d'un établissement public de coopération culturelle entre toutes les collectivités pour partager les dépenses d'investissement et de fonctionnement et qui aurait aussi pour mission de rechercher des partenaires privés ».

Interrogé aujourd'hui, Ludovic Mouly a estimé « qu'un établissement public pour trouver des financements privés est une erreur. Concernant les partenariats privés, nous y travaillons, nous y travaillerons tout le temps des travaux et nous avons déjà plus que des pistes véritables. A titre d'exemple, moi-même et le maire de Rodez avons dîné il y a quelques jours avec une entreprise française intéressée, implantée à l'international et réalisant plusieurs milliards de chiffre d'affaires dans le secteur de l'énergie. » Si le président du Grand Rodez n'a pas cité le nom de la société, le champ des possibles est plus que réduit...

Mikaël Lozano

- www.grand-rodez.com

En photo : Pierre Soulages a posé la première pierre du musée qui lui sera en grande partie consacré, en présence du maire de Rodez Christian Teyssèdre, du président du Conseil général Jean-Claude Luche, du président de Région Martin Malvy, du président du Grand Rodez Ludovic Mouly et de la préfète de l'Aveyron Danièle Polvé-Montmasson (© Rémi Benoit)