Quand il se lance dans l'aventure TableOnLine en 2007, le Toulousain Antoine Girard sort de l'industrie aéronautique et spatiale. La restauration, il n'y connaît rien. "Mon grand père n'est pas artisan boulanger, je n'ai pas de belle histoire à raconter au sujet de la cuisine" sourit le jeune chef d'entreprise. Son idée vient simplement d'un besoin : "Les clients en ont assez de tomber sur un répondeur quand ils veulent réserver une table à 15h pour le soir même, et les restaurants sont sous-équipés en matière d'informatique."

Objectif : réserver une table aussi facilement et instinctivement qu'une chambre d'hôtel. "Qui utilise encore sont téléphone pour réserver une chambre d'hôtel ?" lance Antoine Girard. À cette époque, rien n'existe pour réserver un restaurant sur internet. Une autre entreprise a alors la même idée : LaFourchette.com (racheté en 2014 par l'Américain TripAdvisor). Les deux sociétés grandissent en parallèle (LaFourchette plus vite), avec le même modèle : l'entreprise prend 90 centimes de commission par couvert réservé via son site.

"Mais il faut une masse critique pour être rentable. Pour atteindre cette masse critique, LaFourchette a commencé à proposer des offres spéciales très attractives. Le client réservait via leur site car il pouvait manger moins cher" se souvient Antoine Girard. Puis Groupon est arrivé, en 2010. "Les restaurateurs ont découvert l'effet pervers du couponing : avec des gens qui mangent 50% moins cher, non seulement ils ne margeaient pas suffisamment, mais ils ne fidélisaient pas la clientèle". Devant ce constat, TableOnLine réfléchit à une nouvelle stratégie.  En 2011, c'est "le virage".

"Ce n'est pas possible de bien manger pour pas cher"

"On ne peut pas manger pour pas cher, d'autant plus s'il y a des intermédiaires qui prennent une commission". En 2011 TableOnLine change de modèle économique et propose alors GuestOnLine : un logiciel mis à disposition des restaurateurs sur leurs propres sites internet, et qui permet de réserver en ligne directement, sans intermédiaire. "Nous mettons à disposition des restaurateurs notre technologie de réservation". Il faut donc se rendre directement sur le site du restaurant pour réserver : "cela tombe bien, car 70% du trafic des restaurants viennent de la recherche sur Google du nom du restaurant" justifie le dirigeant.

Ainsi, TableOnLine déploie son logiciel "gratuit, illimité et sans engagement pour le restaurateur." "Nous avons cassé les standards en rendant la réservation gratuite". Actuellement, 1 000 restaurants français ont équipés, plus 500 à l'étranger. Parmi eux, 150 restaurants toulousains ont adopté GuestOnLine. L'objectif "est d'avoir 170 000 établissements clients en France" affirme Antoine Girard. Son discours est clair : "Restaurateurs, vous êtes obligés de prendre le virage du numérique. Soit vous bradez vos repas et LaFourchette fera la pluie et le beau temps chez vous, soit vous utilisez notre logiciel qui vous permet de rester indépendant."

Le big data, source de revenus

En 2014, 20% des réservations (seulement) se font en ligne, contre 80% pour l'hôtellerie. Ce sera 50% à horizon 2017. "Il y a une vraie accélération" dont la société va profiter pour déployer son nouveau modèle économique : des offres payantes. La 1re offre, à 27€ / mois, permet au restaurateur, en plus du module de réservation, une application pour la gestion des tables. La 2e offre payante, à 57 €/mois, mise sur le big data : "Les restaurateurs disposent d'un fichier client qui est une base de données incroyable. Nous proposons des campagnes e-mails et SMS et des statistiques d'analyses de ces données. Un outil marketing et de fidélisation redoutable".

Ces statistiques comprennent par exemple l'analyse du taux d'occupation, le nombre de couvert par réservation, le taux de réservations non-honorées. Les campagnes d'e-mailing sont "ciblées" selon la typologie des clients et les informations disponibles : "allergie, date d'anniversaire, table préférée...". Avec ce nouveau modèle économique TableOnLine espère "doubler le chiffre d'affaires d'ici 2015". La société toulousaine, qui devrait embaucher 10 personnes en 2015, s'apprête à se rendre à Lyon dans le cadre du salon Sirha (du 24 au 28 janvier). Elle a en effet été choisie par GL Events et l'institut Paul Bocuse pour gérer les réservations du restaurant Sixième Sens, espace dédié aux dernières tendances de la restauration, "une sorte de petit Graal pour nous !"