Des Toulousains inventent des plans tactiles pour les aveugles

À Toulouse, les chercheurs de l'Irit,, l'Institut des Jeunes Aveugles et Makina Corpus, société experte en logiciels libres, ont mis au point un éditeur de cartes en relief tactiles pour que les aveugles puissent mieux se repérer dans l'espace.
De jeunes déficients visuels testent la carte en relief posée sur un écran tactile.

Utiliser une carte pour se repérer dans une ville, c'est quasi mission impossible aujourd'hui pour un non-voyant. Du fait de l'encombrement du braille, les cartes adaptées aux aveugles contiennent une quantité d'informations limitées. De plus, elles sont très complexes à réaliser et sont loin d'offrir les mêmes fonctionnalités que les cartes destinées aux personnes voyantes : impossible par exemple d'annoter une carte tactile ou d'évaluer les distances. Pour y remédier, les chercheurs de l'Institut de recherche en informatique de Toulouse (Irit) ont mis au point un éditeur de cartes en relief tactiles pour faciliter l'apprentissage des déficients visuels (malvoyants et aveugles). Pour mener à bien le projet Accessimap, l'Irit s'est associé avec Makina Corpus, société toulousaine experte en logiciels libres, l'Institut des jeunes aveugles de Toulouse et l'école Telecom ParisTech.

Des informations sonores plutôt que des abréviations en braille

L'application, qui s'appuie sur les données libres d'OpenStreetmap, permet de concevoir une carte où les abréviations en braille sont remplacées par des informations sonores. Le dispositif fonctionne avec deux cartes. La première est une carte en relief permettant de distinguer villes, mers, montagnes et frontières. Une fois imprimée, cette carte est posée sur un écran tactile où est enregistré une version numérique de la carte qui permet de déclencher les infos sonores.

"Il est possible d'ajouter plusieurs strates d'informations sur un même point d'intérêt. Par exemple, si l'on touche l'écran avec l'index, on entend le nom de la ville ; avec l'index et le majeur le nom des principaux musées et avec trois doigts les horaires d'ouverture", décrit Christophe Jouffrais, chercheur à l'Irit et coordinateur du projet Accessimap.

Cette technique permet d'intégrer beaucoup plus d'informations qu'une carte en braille. "L'objectif est de rendre l'édition de cartes en relief accessible à un plus large public, notamment aux parents et aux professeurs de déficients visuels", estime Cindy Jeanblanc, chargé de développement chez Makina Corpus.

Plus facile d'utilisation, mais aussi plus interactive, puisque la carte est modifiable à l'infini depuis l'application. "Cela permet aux professeurs d'adapter la carte en fonction des objectifs d'apprentissage et d'ajouter des informations au fil du cours", ajoute Cindy Jeanblanc.

Pour sensibiliser le grand public à ces innovations, les porteurs du projet Accessimap organisent jeudi 22 septembre à Ramonville une "cartoparty" où des aveugles vont arpenter la ville pour collecter des données sur leur quartier (largeur des trottoirs, passages piétons sonores...) et faire en direct une carte en relief.

L'éditeur lui sera lancé en 2017. Il est pour l'instant expérimenté auprès d'une centaine d'élèves de l'IJA de Toulouse et l'Institut national des jeunes aveugles s'est montré intéressé par le projet. "Les professeurs utilisent un écran d'ordinateur tactile d'une trentaine de pouces. Nous planchons sur une version adaptable sur une tablette de 10 pouces pour que les aveugles puissent l'utiliser aussi chez eux. En revanche, un écran de smartphone sera trop petit pour appliquer ce dispositif", poursuit Christophe Jouffrais.

Vidéo de démonstration des cartes en relief.

Tags et montre connectée

Le deuxième projet d'Accessimap est de mettre au point une table collaborative permettant aux déficients visuels de construire et d'explorer de manière autonome une carte. Une caméra et un cadre infrarouge placés sous la table tactile repèrent la position des doigts de l'utilisateur. Des instructions audios aident la personne aveugle à poser des objets équipés de tags sur la carte pour localiser les points d'intérêt de la ville (école, musée, banque...). Chaque objet est muni d'un enrouleur, permettant à l'utilisateur de tracer des lignes pour "matérialiser" les rues de la ville. Une fois la carte terminée, le déficient visuel peut écouter le nom des différents points et lignes en les pointant avec le doigt.

"Ce système a été évalué avec 8 déficients visuels, qui devaient construire quatre cartes de complexité croissante. 283 sur 288 objets ont été correctement placés et 27 cartes sur 32 ont été parfaitement reconstruites", indiquent les chercheurs dans une publication du CNRS. Prochaine étape du projet de recherche: permettre aux utilisateurs de zoomer sur la carte.

 Vidéo de démonstration de la table collaborative.

Les chercheurs planchent enfin sur un troisième dispositif où l'aveugle équipé d'une montre connectée passe sa main au-dessus d'une table tactile et obtient des indications sonores pour se repérer sur la carte.

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.