Recherche : Toulouse perd l'Idex, pourquoi c'est grave

L'Université fédérale de Toulouse a perdu le 30 avril son label d'Initiative d'excellence (Idex) et ses 25 millions d'euros de financements annuels. Signal négatif pour l'attractivité de la ville, emplois menacés... Les conséquences seront importantes pour le monde de la recherche.

Coup dur pour le monde universitaire toulousain. Ce vendredi 30 avril, la Ville rose s'est vue retirer le label Idex (Initiative d'excellence) qui lui avait permis de toucher 25 millions d'euros de financements par an depuis 2013. Lancé dans le cadre du programme d'investissements d'avenir (PIA), ce label vise "à faire émerger de 5 à 10 sites universitaires et de recherche à visibilité mondiale" en France. Le jury international chargé de l'évaluation a confirmé les Idex d'Aix-Marseille, Bordeaux et Strasbourg. En revanche, pour l'ensemble Sorbonne Paris Cité et pour l'Université fédérale de Toulouse, il estime que :

"L'objectif Idex est impossible à atteindre sans une dynamique toute nouvelle et des mesures de rupture. Il (le jury, NDLR) a en effet considéré qu'on ne pouvait observer une adhésion des acteurs à une démarche de transformation conduisant à une université de recherche intégrée, visible au plan international et reconnue comme telle."

Toulouse a donc perdu son label. Dès cette annonce, des réactions politiques inquiètes ont afflué. Pour le président de Toulouse Métropole Jean-Luc Moudenc, "ce constat sanctionne le manque d'ambition des acteurs universitaires toulousains à constituer un ensemble pluridisciplinaire d'enseignement supérieur et de recherche de rayonnement mondial à Toulouse". L'élu "appelle solennellement les universités toulousaines à tenir l'engagement qu'elles avaient pris en 2012 de se construire une identité unitaire".

LRMP, une des seules régions françaises à ne pas être dans le dispositif

Le maire de Montpellier Philippe Saurel s'est alerté de son côté du manque de visibilité des universités régionales alors que sa métropole s'est déjà vue refuser le label en janvier dernier : "Nous sommes quasiment la seule région en France a être absente du dispositif Idex. C'est trop grave en termes d'université et de repérage mondial."

Pourtant, Toulouse est la 2e ville universitaire de France en dehors de Paris avec plus de 126 000 étudiants inscrits dans l'académie et l'ancienne région Midi-Pyrénées a été classée première région française avec 4,1 % du PIB consacré aux dépenses R&D. Toulouse a également été sélectionnée pour être la capitale européenne de la science en 2018.

"Je suis déçu, triste, choqué et embêté : l'Idex faisait partie d'une stratégie d'ensemble ambitieuse en termes de recherche. C'est grave car Toulouse a toujours souffert d'un défaut d'image, complète Gilbert Casamatta, président de l'Institut de recherche technologique (IRT) Saint-Exupéry et ancien président du PRES (Université de Toulouse). Il se déroule ici des performances scientifiques de premier plan et, pourtant, quand on demande de citer des sites de références, le nom de Toulouse arrive toujours très tardivement. Nous avons un mauvais sens de la communication, et cela nuit à la notoriété de la ville. Le label Idex permettait d'attirer des chercheurs internationaux. Une reconnaissance officielle rassure et motive."

Tous les acteurs universitaires se disent surpris de cette annonce, pourtant dès février dernier, des critiques avaient été émises à l'encontre du mode de gouvernance de l'Université fédérale et de l'avancement du programme Idex.

Du côté du Conseil régional, la vice-présidente en charge de l'Enseignement supérieur Nadia Pellefigue se dit "surprise et agacée" par cette annonce "un peu raide" : "la 4e aire urbaine de France n'est pas reconnue sur la qualité de sa recherche au même niveau que Bordeaux ou Marseille", regrette-t-elle.

20 emplois menacés ?

Avec l'arrêt de l'Idex, les membres de l'Université fédérale de Toulouse vont perdre 25 millions d'euros de financements annuels sur un budget global de 1,2 milliard d'euros. Selon Marie-France Barthet, présidente du regroupement, "20 emplois au sein de la Comue (communauté universitaire) étaient directement financés par l'Idex". Elle assure que les doctorants dont la thèse a été financée grâce à cette aide de l'État pourront aller au terme de leur projet de recherche. En revanche, les 15 chaires universitaires créées depuis 2013 seront fermées et n'accueilleront pas de nouveaux thésards.

"Plus que la question de l'emploi, c'est la dynamique scientifique qui est impactée. Nous avons mis en place une école doctorale, de nouveaux locaux, la Toulbox (pour l'accueil des nouveaux arrivants, NRDL). Ces initiatives sont en plein décollage et on nous coupe les vivres. C'est une gabegie, c'est absurde", s'agace Marie-France Barthet.

La présidente de l'Université fédérale de Toulouse a prévu d'organiser une conférence de presse mercredi matin pour commenter les notes du jury qu'elle aura pu consulter d'ici là. Nadia Pellefigue se dit même "impatiente" de lire ces avis motivés "pour comprendre quels ont été les critères du jury". Les responsables universitaires décideront ensuite de lancer ou non une nouvelle procédure de labellisation. Marie-France Barthet va quant à elle quitter ses fonctions, comme c'était prévu, pour rejoindre la commission formation de la région LRMP.  Son successeur sera élu le 1er juillet prochain.

"Le jury préfère la fusion à la fédération"

Pour Joël Echevarria, directeur général des services de TSE, le choix du jury montre que "les trois universités confirmées dans leur label Idex avaient toutes opté pour la fusion, c'est la seule logique de gouvernance privilégiée. Ce constat est inquiétant car le gouvernement avait laissé chaque site s'organiser à sa façon." Selon lui, "la majorité des acteurs universitaires toulousains s'opposent à cette logique. Contrairement à d'autres villes, Toulouse a beaucoup d'écoles d'ingénieurs, les établissements dépendant de 5 à 6 ministères différents, la fusion est impossible techniquement." Nadia Pellefigue assure également que "le modèle de fusion de la gouvernance n'était pas annoncé comme étant un critère déterminant".

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