Idex, le dossier de la discorde à Toulouse ?

Le renouvellement de l'Idex va-t-il faire renaître cette année les tensions que le monde universitaire toulousain avait traversé en 2012 lors de l'obtention de ce label d'excellence pesant 25 millions d'euros par an ? Pour certains observateurs, l'Université n'a en effet pas tenu tous ses engagements et manquerait d'ambitions pour les années à venir. Des critiques réfutées par Marie-France Barthet, la présidente de l'Université fédérale de Toulouse.
L'Université fédérale de Toulouse.

Quatre ans après un départ houleux, l'Idex (Iniative d'excellence) va-t-il à nouveau déchirer la communauté universitaire et scientifique toulousaine ? À l'occasion du renouvellement de ce financement de 25 millions d'euros par an, le bilan d'évaluation, publié en décembre 2015, ravive certaines tensions "entre les tenants d'une université plus libérale, et ceux favorables à une conception plus communautaire", relève un élu toulousain : "Cela provoque des discussions car les conceptions différentes s'affrontent."

Selon certaines critiques, la Comue (Communauté d'universités et établissements) n'aurait pas respecté les engagements pris en 2012, lorsque Toulouse a remporté l'Idex.

"Il y a des réussites comme l'école doctorale, mais il y a du retard, regrette un proche du dossier. Le diplôme de doctorat unique, qui devait être délivré par l'Université de Toulouse, n'existe pas encore. Le collegium Toulouse ingénierie, réunissant les écoles d'ingénieurs, ne va pas assez loin. Comparée aux autres universités de l'Idex, l'Université de Toulouse n'a pas embauché suffisamment de professeurs de talents (15 en trois ans, NDLR)."

Une gouvernance critiquée

C'est principalement sur la gouvernance que le bilan de l'Idex toulousain est critiqué. Comparée aux sept autres universités de l'Idex (Bordeaux, Strasbourg, Marseille, Sorbonne Université, Paris Sciences Lettres, Sorbonne Paris Cité et Paris Saclay), Toulouse serait moins avancée sur la gouvernance. "Le Conseil d'administration a 79 membres. Il en faudrait 4 ! Avec plus de pouvoirs, mais aussi plus facilement révocables, s'exclame la même source. L'objectif de l'université est de donner un diplôme de meilleure qualité et de faire une recherche plus performante. Une gouvernance au fonctionnement trop démocratique peut déliter cet objectif."

Un constat en partie partagé par Toulouse Métropole. "L'université s'est solidifiée mais nous observons un écart entre ce qui a été réalisé et ce qui était prévu, remarque François Chollet, vice-président (LR) en charge de l'Enseignement supérieur et de la recherche. Je ne crois pas que cela remette en cause le renouvellement de l'Idex, mais il faudra expliquer au jury pourquoi on n'est pas allé aussi loin que prévu."

Venu ce lundi 22 février pour l'inauguration officielle des nouveaux locaux de la Comue, Thierry Mandon, secrétaire d'État à l'Enseignement supérieur et de la recherche, s'est prononcé en faveur d'une "gouvernance resserrée".

"J'observe l'originalité du projet et le potentiel de l'Université de Toulouse. Elle a la capacité de trouver une gouvernance simplifiée, plus agile. L'université fédérale n'est pas contradictoire avec une gouvernance resserrée", a-t-il précisé lors d'une conférence de presse.

Des perspectives trop timides ?

Outre le bilan, les perspectives présentées par la Comue suscitent également quelques critiques. "Le dossier n'est pas assez ambitieux. Il faut faire tomber les frontières entre les universités, les grandes écoles et les établissements de recherche. Une grande accélération est nécessaire et cela n'apparaît pas dans le dossier", s'exclame un ancien chercheur.

D'après ce dernier, le CNRS, partie prenante de la Comue et de l'Idex toulousain, aurait envisagé de ne pas participer à la défense de ce dossier, du fait de ses lacunes. Une information que le CNRS n'a pas souhaité confirmer, refusant de s'exprimer sur la question.

Du côté de l'Université fédérale de Toulouse, on dément le retrait du CNRS tout en reconnaissant certaines "réflexions" apportées par l'institut de recherche.

"Alain Fuchs, le président du CNRS, souhaiterait que nous allions plus loin, sur la gouvernance notamment, admet Marie-France Barthet, la présidente de l'université fédérale de Toulouse. Nous sommes en train d'intégrer ses réflexions. C'est vrai que, sur ce point, nous n'avons pas été assez précis. Depuis que le dossier a été publié, j'écoute ce qu'on me dit et je mets davantage en valeur certains éléments."

Début février, une réunion s'est tenue à la préfecture de Région entre le préfet et la présidente de l'Université fédérale. "Recadrage", selon certains, "point d'étape", selon les service de la préfecture et Marie-France Barthet. Pour celle-ci, les attaques sont l'œuvre d' "aigris qui jouent contre leur camp":

"Cela m'écœure qu'on donne de telles informations. Le préfet ne m'a pas demandé de revoir le dossier. Il voulait faire le point et savoir comment il pouvait participer. Nous sommes en évaluation, ce n'est pas facile. Nous devrions nous serrer les coudes."

Trois membres du jury en mars à Toulouse

Dans ce contexte un peu tendu, l'Université toulousaine poursuit malgré tout son calendrier lié à l'évaluation prochaine de l'Idex. Avant l'oral devant le jury international en juin prochain, trois de ses membres viendront sur le site toulousain les 15 et 16 mars prochains. Pendant cette visite marathon de six heures et demi, Pierre de Maret, pro-recteur de l'Université libre de Bruxelles, Jamil Salmi, coordinateur pour l'enseignement supérieur à la Banque Mondiale et Andrée Sursock, conseillère principale à l'Association européenne de l'université, rencontreront l'équipe dirigeante et une centaine d'enseignants, de doctorants et d'étudiants.

Objectif pour l'Université fédérale de Toulouse : convaincre le jury "qu'il y a une vraie dynamique entre les universités, les écoles et les établissements de recherche" et pérenniser ce financement de 25 millions d'euros par an destiné à améliorer les performances de l'université toulousaine.

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