Des Toulousains mettent au point le premier hélico électrique conventionnel

Un entrepreneur toulousain vient de mettre au point avec l'Enac (école nationale d'aviation civile) le premier prototype d'hélicoptère électrique conventionnel au monde. Biplace, le produit sera doté d'une batterie électrique capable de voler une quarantaine de minutes d'affilée. Le projet Volta vise d'ici 5 ans la mise en service de son hélico-école à destination des aéroclubs.
Le démonstrateur du projet Volta a été présenté le 18 novembre lors des Assises aéronautique et développement durable organisées par l'Énac.

Quand le moteur électrique démarre, on est d'abord frappé par le son léger généré par l'engin. Rien à voir avec l'assourdissant bruit d'un hélico classique. Cet hélicoptère doté de batteries électriques a été présenté le 20 novembre dernier, à l'occasion des Assises aéronautique et développement durable organisées par l'Enac (École nationale de l'aviation civile) à Toulouse. "C'est le premier hélicoptère électrique conventionnel (au format standard, NDLR) dans le monde", explique Philippe Antoine, à l'origine du projet.

Cet ingénieur du groupe Latécoère a d'abord travaillé au début des années 2000 sur la fabrication d'un hélicoptère électrique, le Microcopter. L'appareil a volé pour la première fois à Muret en 2004, mais rapidement le projet a été abandonné à cause d'un problème de motorisation.

Un hélico-école pour les aéroclubs

En 2012, Philippe Antoine décide de lancer le projet Volta. L'entrepreneur remotorise totalement l'appareil pour y placer une batterie électrique. Le défi : réaliser une batterie suffisamment puissante pour assurer le décollage. Jusqu'ici, les deux seuls hélicoptères électriques ayant déjà volé à travers le monde n'ont tenu respectivement que 10 secondes et 2 minutes. Des performances médiocres comparées à la traversée de la Manche de 37 minutes de l'E-Fan, l'avion 100% électrique d'Airbus ou encore l'avion Solar impulse qui est parvenu à franchir le Pacifique en 117 heures l'été dernier.

"Contrairement à un avion, l'E-Fan en particulier, un hélicoptère a besoin de de deux fois plus de puissance pour décoller. Il faut donc tirer un maximum d'énergie de cette batterie très rapidement", explique Philippe Antoine. Le prototype Volta est lui conçu pour un vol stationnaire de 20 minutes, c'est moins que ce que permettent les batteries de l'E-Fan (qui tiennent 40 minutes), mais nous devons avoir beaucoup de puissance dans un laps de temps très réduit."

En avril 2015, Philippe Antoine se rapproche de l'Enac à l'occasion des journées de l'hélicoptère organisée au sein de l'école. "Il est arrivé avec tout sauf le tableau de bord, se rappelle Stéphane Conversy, enseignant-chercheur à l'Enac. Il n'avait pas les compétences pour réaliser l'affichage (appelé l'IHM avionnque, NDLR). En l'espace de trois mois, notre équipe d'enseignants-chercheurs a mis au point un tableau de bord fonctionnel."

Les premiers essais au sol ont démarré cet été et les porteurs du projet attendent désormais l'aval de la DGAC (direction générale de l'aviation civile) pour pouvoir entamer les essais de vol, si possible d'ici la fin de l'année.

"Nous voulons démontrer que nous sommes capables de voler suffisamment longtemps pour éveiller l'intérêt et que la technologie est maîtrisée pour travailler ensuite avec l'Enac sur un hélicoptère-école biplace, à l'image de l'E-Fan, annonce Philippe Antoine. Dans la formation hélicoptère, les 10-15 premières heures se font à proximité immédiate de l'aérodrome pour l'apprentissage des manœuvres.

L'idée est de ne pas brûler tout ce pétrole pour rien, mais aussi d'éviter les nuisances sonores avec les riverains et d'amener l'hélico dans les villes. Aujourd'hui à Toulouse, il faut aller à Nogaro (Gers) ou à Castres pour trouver les aérodromes les plus proches, pas loin d'une heure de trajet."

Quatre fois moins cher qu'un hélico classique

Autre innovation, le Volta sera équipé de batteries amovibles pour multiplier les petites séquences de vol et réaliser in fine un long vol. "Les batteries peuvent aussi être alimentées via des cellules photovoltaïques sur un hangar d'aéroclub, imagine déjà Philippe Antoine. Vous rechargez 3 ou 4 batteries pendant que vous volez avec une seule. Vous permutez ensuite et vous volez ainsi toute la journée, gratuitement. La maintenance est quasi inexistante."

Selon les premières estimations des concepteurs, l'utilisation de l'appareil reviendrait à 100 euros de l'heure contre 400 euros aujourd'hui pour un hélico à moteur thermique. Jusqu'ici, le projet a été financé totalement en fonds propres. Philippe Antoine a réinvesti les bénéfices d'Aquinea, une petite entreprise spécialisée dans l'éclairage de piscines et créée spécialement pour capter des fonds pour le projet Volta. Désormais, l'entrepreneur cherche à mobiliser un cluster d'entreprises autour de lui. Un appel à candidatures est lancé pour constituer l'équipe.

"Nous avons besoin de partenaires pour la conception aéronautique, la fabrication de pièces métalliques, composites, l'électronique. L'idée est de ne pas dépasser 3 ans de développement et que d'ici 5 ans les batteries atteignent une cinquantaine de minutes d'autonomie", prévoit l'ingénieur.

Les étudiants ingénieurs de l'Enac seront chargés de leur côté de recueillir les besoins des clubs de formations pour établir un cahier des charges de l'appareil. Lors de la conception de l'E-Fan, les élèves avaient déjà travaillé avec Airbus sur la partie avionnique, la spécification des batteries et comment le projet pouvait s'insérer dans le contrôle aérien.

"Nous aimerions à terme que Muret devienne une plateforme pour le développement de ce type de technologie", ambitionne Stéphane Conversy. Peut-être avec les E-Fan, mais aussi de la géothermie, des panneaux photovoltaïques sur les hangars électriques pour la génération d'énergie. Ce pôle serait une vitrine pour ces projets locaux".

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