La "crèche à idées" de Capgemini : quand régresser fait innover

À Toulouse, plusieurs entreprises ont opté pour une nouvelle organisation du travail au style très particulier : les "crèches à idées". Des lieux de travail d’un nouveau genre, enfantins, supposés favoriser les processus de création et accélérer la résolution des problèmes au sein de l’entreprise. Parmi elles, Capgemini. La société de conseil et d'ingénierie propose même d'installer sa crèche à idées au cœur des entreprises.
"Crèche à idées" de Capgemini

Imaginez que votre entreprise retourne en enfance. Imaginez, à la place du traditionnel open-space, des Crayolas, des poufs de toutes les couleurs, des ballons, et des peluches partout sur le sol. Tout ça dans un seul but : travailler plus efficacement. Sceptique ?

À l'heure où la morosité est partout, où la productivité est devenue une obsession nationale, et la recherche de performance un Leitmotiv, tout est bon à prendre. Et pourquoi pas des crèches pour adultes après tout ?

"L'idée est de proposer un environnement de travail qui va accélérer la prise de décision et la résolution de situations problématiques, raconte Patrice Duboé, vice-président du pôle Innovation à Capgemini. Le salarié pense différemment parce qu'il est dans un environnement différent."

Capgemini fut l'une des premières entreprises à appliquer le concept en France. Et même à le monétiser, depuis 2005, dans la Ville rose. Au cœur même des entreprises ou dans ses locaux toulousains, la société de conseil et d'ingénierie propose en effet des sessions de sa propre version de la "crèche à idées", l'Accelerated Solution Environnement (ASE).

Un concept issu de l'École Montessori

Le concept des "crèches à idées" est né aux États-Unis il y a plus de trente ans maintenant. Matt Taylor, architecte, veut optimiser le travail de différents corps de métiers intervenant sur un même chantier et ainsi réduire la durée des travaux. Sa femme, Gail Taylor, est de son côté enseignante, pionnière de l'"accelerated learning" dans son pays. Matt Taylor décide alors d'utiliser, sur ses chantiers, les concepts développés par son épouse dans le cadre de l'école Montessori, lesquels mettent en avant l'environnement dans lequel évolue l'individu. Et les résultats dépassent ses espérances. C'est la naissance des "crèches à idées".

À Toulouse, Trinité Laroche est "facilitatrice" lors des sessions ASE de Capgemini. Elle raconte une expérience personnelle similaire à celle de Matt Taylor. L'histoire d'une grosse entreprise française, dont elle ne souhaite pas donner le nom :

 "L'entreprise devait rassembler tous ses centres de recherche suite à une restructuration en un temps record. On parle ici de plusieurs centaines de salariés à faire travailler ensemble du jour au lendemain. Et je n'avais pas imaginé un tel degré de divergence. Pourtant, un jour et demi de session plus tard, le problème était réglé, les solutions trouvées."

La crèche à idées : une méthode de travail avant tout

Avant d'être un espace de travail particulier, la "crèche à idées" est une méthode de travail. Et comme toute méthode, elle a ses règles et ses leviers. Les "scribers" en sont un bon exemple. Présents lors de toutes les sessions d'ASE, ces dessinateurs captent en temps réel les réflexions des salariés pour les retranscrire en dessin sur les immenses tableaux de la crèche à idées et les partager aux autres participants. Tout ça dans un seul but : favoriser la compréhension de l'autre et des problèmes.

De même, les sessions ASE se déroulent toujours en trois phases successives, dont la première est sans doute la plus importante.

"Il s'agit d'une phase d'alignement. Tout le monde peut avoir conscience d'un problème présent dans l'entreprise mais pas le même niveau de compréhension de celui-ci. Ou des points de vue différents également. Il s'agit de gommer ces différences en utilisant encore une fois un environnement particulier", raconte Trinité Laroche.

Une fois cette phase d'alignement terminée, tout s'accélère. Suivent alors les deux phases suivantes, celles espérées par l'entreprise : la recherche de solutions et leurs mises en application.

Régresser pour innover

À Toulouse, une autre entreprise a opté pour la crèche à idées. Mediameeting, société spécialisée dans la radio d'entreprise, a installé en mai 2014 au sein de ses locaux sa propre crèche à idées. "Plusieurs études aux États-Unis ont montré que la mise en place d'un environnement régressif favorisait les processus de créativité. Pour nous qui cherchons constamment à innover, y compris au niveau organisationnel, c'était une évidence", explique Anne-Marie de Couvreur, la présidente.

Elle constate un bénéfice pour le moins inattendu des "crèches à idées". "Je n'avais pas prévu que cela ferait baisser l'agressivité dans nos locaux. Ce fut une bonne surprise." Plutôt qu'un juron, les employés envoient désormais des peluches au visage. Un moindre mal. Mais pour la directrice de Mediameeting, la meilleure des surprises fut l'accueil des salariés. "Aujourd'hui, la crèche à idées connaît un taux d'occupation de 100 %. Il faut même réserver plusieurs jours à l'avance pour l'occuper." Alors, toujours sceptique ?

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