COP21 : La RSE n'est-elle qu'un alibi pour les entreprises ?

À l'occasion de la COP21, une conférence-débat sous la forme d'un procès était organisée le 3 décembre dernier à la CCI Midi-Pyrénées sur la notion de responsabilité sociétale des entreprises (RSE). À la barre, chefs d'entreprises, syndicalistes ou consultants ont témoigné. La RSE n'est-elle qu'un alibi pour les entreprises ? Crée-t-elle de la valeur ou au contraire menace-t-elle la santé des sociétés? Éléments de réflexion.
Le grand procès de la RSE a eu lieu le 3 décembre

"Jurez-vous de dire toute la vérité, rien que la vérité? Levez la main droite et dites je le jure". À la barre, le témoin s'exécute. Le président a revêtu une robe rouge. En face, les avocats et le procureur ont eux aussi adopté la tenue de rigueur. Sauf qu'il ne s'agit pas d'un procès classique mais d'une mise en scène organisée au sein de la CCI Midi-Pyrénées de Blagnac à l'occasion de la COP21 par le collectif Place to Be. Pendant toute une après-midi, le 3 décembre dernier, chefs d'entreprises, syndicalistes ou consultants ont débattu autour de la notion de responsabilité sociétale des entreprises (RSE).
Selon la Commission européenne, la RSE est un "concept dans lequel les entreprises intègrent les préoccupations sociales, environnementales et économiques dans leurs activités et dans leurs interactions avec leurs parties prenantes sur une base volontaire". Elle peut se traduire par des actions en faveur de l'égalité homme/femme, la réduction des déchets, la mise en place d'un management collaboratif... Cette démarche peut être reconnue par différents labels (ISO 14 000, ISO 26 000).

La RSE est-elle un alibi pour les entreprises ?

Mais l'application et l'efficacité de la RSE sont parfois critiquées. Dans la salle de conférences de la CCI, Jacques Igalens, professeur à l'IAE (et ancien directeur de TBS), a endossé le rôle de président du tribunal, et émet le chef d'accusation suivant :

"La RSE n'est-elle qu'un alibi pour les entreprises ? N'est-on pas dans le greenwashing?"

Le premier témoin appelé à la barre est Didier Suberbielle, PDG du groupe Nutrition & Santé (par ailleurs actionnaire minoritaire de La Tribune Objectif News). Basée à Revel, cette société est spécialisée dans la nutrition diététique et biologique.

"Quand des compagnies pétrolières ou de grandes entreprises du secteur automobile mettent en avant leur démarche RSE, vu la nature de leurs activités, cela jette le discrédit sur leur engagement vis-à-vis de l'environnement. Pour de telles entreprises, la RSE est effectivement un alibi. Mais d'autres sont dans une démarche sincère et j'espère faire partie de cette deuxième catégorie".

Mais "suffit-t-il d'exercer dans le secteur du bio et ou lien avec la santé pour être de fait en adéquation avec la RSE ?", s'interroge la cour. "Effectivement, je connais des entreprises bio où la consommation énergétique et les heures de travail sont excessives", rétorque Didier Suberbielle. Secrétaire générale de la CFDT d'IBM France, Isabelle Ricard endosse le rôle de la procureure et enfonce le clou :

"Les entreprises ne se saisissent que des versants de la RSE les plus rentables pour leur activité. Ainsi selon une étude de Generali, 60% des entreprises labellisées RSE se sont engagées à diminuer leur consommation de gaz, d'électricité et d'eau, 70% à réduire l'utilisation du papier et à recycler. En revanche, seules 1/4 d'entre elles ont réalisé une compensation carbone de leur activité et la moitié n'envisage pas le faire. 75% n'utilisent pas d'énergies renouvelable".

Quel est l'impact de la RSE sur l'activité ?

Autre chef d'accusation du procès : "La RSE est-elle un frein à la création de valeur ajoutée d'une entreprise ?" et par ailleurs, "est-ce un utopie trop contraignante ?"

Directeur de la société hydroélectrique du Midi (installée à Balma), Serge Clerens témoigne :

"Mettre en œuvre une démarche RSE n'a coûté que quelques milliers d'euros à l'entreprise, soit 0,01% de notre chiffre d'affaire. Le plan de déplacement au travail que nous avons mis en place n'a lui coûté que 1% de notre chiffre d'affaires".

De son côté, Dominique Olivier, directeur de la coopérative Fermes de Figeac, constate que cette démarche n'a pas freiné son activité. "En 1985, nous étions 8. Aujourd'hui, nous sommes 160 et notre chiffre d'affaires connait une croissance de 5% chaque année".

Plus généralement, le consultant d'Audencia Nantes Frédéric Alexis remarque que "90% des entreprises qui font de la RSE ne font pas faillite. D'un autres côté, 80% des sociétés qui n'en font pas ne font pas faillite non plus".

"Les entreprises prônant la RSE comportent donc moins de risque. Cette donnée est intégrée aujourd'hui par les assurances qui en prennent compte".

Au terme des interventions, le public était invité à voter par SMS pour condamner ou non la RSE. Les spectateurs ont majoritairement soutenu la relaxe. Ouf !

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