Sanofi Toulouse : que sont devenus les anciens salariés ?

Alors que les négociations avec la direction sont closes et que le transfert de plus de 200 d’entre eux au sein de l’entreprise allemande Evotec doit intervenir fin mars, les salariés toulousains du groupe pharmaceutique Sanofi font les comptes. Depuis 2012, leurs effectifs ont déjà fondu de près de 400 personnes. Mais que sont devenus les anciens Sanofi Toulouse ? Enquête.
Les anciens salariés toulousains de Sanofi ont connu des destins divers

Le bras de fer s'achève dans l'amertume pour les salariés toulousains de Sanofi. Le 3 mars dernier, en organisant une manifestation à l'appel de l'intersyndicale CFDT-CFTC-CFE/CGC-CGT-Sud Chimie, ils avaient conscience de faire leur "baroud d'honneur", comme le soupire Pascale Legoux, déléguée syndicale CFDT de Sanofi Toulouse. Sur les quelque 250 salariés toulousains, 209 devraient passer sous le contrôle de l'entreprise allemande Evotec au 31 mars prochain, dans le cadre de la cession d'une partie des activités du groupe. Il s'agit des effectifs de la plateforme de recherche et de la plateforme technologie de Sanofi Toulouse. Seule une quarantaine de personnes resterait ainsi sous la bannière du groupe pharmaceutique français.

Une situation que les salariés ont du mal à accepter. D'autant que, selon eux, les négociations menées avec la direction "n'ont pas mené à de véritables avancées", comme le regrette Pascale Legoux.

"Nous demandions trois choses, rappelle-t-elle. Tout d'abord, le maintien jusqu'en 2020, pour les salariés transférés, d'une douzaine d'accords, les plus importants parmi les 70 accords qui courent. Nous souhaitions par ailleurs que Sanofi s'engage à réintégrer jusqu'à cette date les salariés transférés en cas de licenciements économiques par Evotec."

Et surtout, les représentants syndicaux demandaient au groupe pharmaceutique d'accorder à chaque salarié transféré un chèque de 50 000 euros. "La direction nous propose 20 000 euros, grince Laurent Besson-Imbert, représentant syndical de Sud Chimie Toulouse. Nous sommes en colère. Le mépris affiché par Sanofi est dur à avaler, car le site de Toulouse leur a rapporté beaucoup d'argent."

Pascale Legoux confirme : "C'est la guerre des nerfs avec la direction. Nous les avons bien embêtés, alors ils nous punissent avec une 'primette'. Nous sommes vraiment épuisés par ce combat."

Épuisés et amers, alors que le bonus de bienvenue de 4 millions d'euros offert au nouveau PDG du groupe pharmaceutique, Olivier Brandicourt, fait actuellement polémique.

De son côté, Flore Larger, porte-parole de Sanofi, indique que "les discussions avec les partenaires sociaux suivent leur cours. Des propositions fortes ont été faites. Un projet d'accord leur a été adressé pour signature." À la CFDT, Pascale Legoux indique qu'elle "ne le signera pas".

"Ils ont pris un chèque"

Aujourd'hui, les dés sont jetés. L'essentiel des effectifs du site toulousain devrait passer sous pavillon allemand d'ici à la fin du mois. Et si Sanofi s'est engagé à investir sur les plateformes toulousaines une enveloppe de 250 millions d'euros en cinq ans dans le cadre d'un programme conjoint de recherche, il ne resterait plus qu'une quarantaine de salariés du groupe français sur le site. Contre plus de 600 en 2012.

Entre-temps, les ex-Sanofi toulousains ont connu des destins divers. Certains ont été mutés en interne, "à Paris, Montpellier et surtout à Lyon", précise Pascale Legoux. D'autres - "une centaine", selon la responsable syndicale - sont partis en pré-retraite. Par ailleurs, "environ 150" ont quitté le groupe dans le cadre de départs volontaires. "Dans l'incertitude, ils ont pris un chèque et sont allés voir si le comportement des employeurs était plus intéressant ailleurs", analyse Laurent Besson-Imbert.

Le représentant syndical de Sud Chimie Toulouse ajoute, acide : "C'est d'ailleurs la stratégie de Sanofi, qui attend que ça dégraisse tout seul !"

Des reconversions dans la pâtisserie

De retour sur le marché du travail, les anciens salariés Sanofi de Toulouse ont suivi des voies différentes. "Certains ont retrouvé du travail ailleurs", se réjouit Pascale Legoux. "Notamment chez Airbus et Pierre Fabre", croit savoir Laurent Besson-Imbert. "D'autres ont suivi des formations financées par Sanofi avant d'emprunter d'autres voies", indique Pascale Legoux. Un choix plus ou moins payant, selon elle : "Certains sont malheureusement au chômage, mais d'autres réussissent très bien et ont retrouvé du travail."

Avec des cas de reconversions parfois étonnants, comme cet ancien Sanofi devenu pépiniériste. Et même ces "quatre ou cinq cas" de reconversions recensés par Laurent Besson-Imbert... dans la pâtisserie.

"Je ne juge surtout pas, mais c'est parfois un gâchis, soupire le syndicaliste. Nous avions ici des gens avec un potentiel fort, une réelle expérience dans leur métier. Mais, à un certain moment, Sanofi acceptait tout. On serait venu en disant 'je veux faire de la peinture sur escargots', ça aurait été OK. Ils voulaient juste se désengager. Tout départ était bon."

Et tout retour, plutôt compliqué. Certains salariés, qui avaient choisi de quitter Sanofi, ont ensuite voulu réintégrer le groupe. "Mais ce n'était plus possible", glisse Pascale Legoux.

Quelques créations d'entreprises

Quelques anciens Sanofi Toulouse ont par ailleurs fait le pari de la création d'entreprise, avec le soutien de leur ancien groupe, dans des secteurs divers : big data, coaching, biostatistique... Didier Payen est l'un d'entre eux. "J'étais directeur de la formation pour la R&D et j'avais un choix à faire, confie-t-il. Je pouvais occuper les mêmes fonctions dans le groupe. On me proposait de travailler à Paris au moins trois jours par semaine. Ou je pouvais sortir et essayer autre chose." Il choisira finalement cette seconde option, en créant en octobre 2014 la société de conseil en organisation et gestion de la formation Themanis et en s'associant par ailleurs au groupe Rist, à travers l'activité Rist Training.

"Les conditions de sortie étaient très favorables, assure-t-il. J'ai bénéficié d'une indemnité de départ correspondant à quatre ans de salaire, mais aussi d'un coup de pouce de la cellule essaimage de Sanofi."

Un soutien sous forme d'accompagnement, d'aide à la validation de son projet, mais pas seulement. "Au total, j'ai reçu des aides financières de Sanofi à hauteur de 40 000 euros", comptabilise Didier Payen, qui est par ailleurs toujours hébergé - gracieusement - dans les locaux toulousains du groupe. Aujourd'hui, l'homme dit ne pas regretter son choix. "Être son propre patron, ça change la vie, confie-t-il. Je me lève tous les matins à la même heure qu'avant, mais je ne mets plus de réveil."

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