Aéronautique : Stelia Aerospace implante une filiale à Seattle

Stelia Aerospace, spécialiste toulousain des aérostructures et des sièges d'avions, prépare l'installation d'une nouvelle filiale à Seattle. Cédric Gautier, PDG de cette filiale d'Airbus, souhaite en effet se rapprocher de son autre client principal Boeing. Il milite également pour une restructuration sérieuse de la supply chain française.
Cédric Gautier, PDG de Stelia Aerospace, était ce matin l'invité de La Tribune Toulouse

Stelia pourrait être le symbole d'une consolidation de la supply chain aéronautique réussie : avec un chiffre d'affaires de 2 milliards d'euros en 2015 et un effectif de 6 300 personnes à travers le monde, le groupe, né en 2014 de la fusion de Sogerma et Aerolia, est numéro 1 européen des aérostructures, numéro 1 mondial des sièges pilotes et numéro 3 mondial des sièges passagers. Une "masse critique" qui permet à l'entreprise d'envisager de nouvelles opérations de croissance externe (encore confidentielles) et la conquête de nouveaux marchés. L'artisan de cette réussite est Cédric Gautier, ex responsable du programme A400M chez Airbus et PDG de Stelia Aerospace. Décrit par ses collaborateurs comme un "capitaine d'industrie", il était ce jeudi 8 septembre l'invité de La Matinale de La Tribune Toulouse. Il annoncé pour la première fois l'implantation du groupe à Seattle.

Une filiale américaine

Filiale à 100% d'Airbus, Stelia n'en n'est pas pour autant le partenaire exclusif.

"Airbus représente 70% de notre activité, mais en aucun cas nous n'avons un statut de privilégié. Nous répondons aux appels d'offres au même titre que la concurrence et devons nous battre pour obtenir les contrats", indique le PDG.

Stelia, qui remporte environ 80% des appels d'offres émis par Airbus, souhaite diversifier son portefeuille clients : "nous voulons que la part d'activité hors Airbus progresse, il faudrait qu'elle double ou triple dans les 3-4 ans à venir". C'est dans cet objectif que le groupe installe en ce moment une filiale à Seattle :

"Le Canada et les USA sont importants pour nous, nous y déjà 600 salariés. Dans cette zone, Boeing est notre premier client et Bombardier le deuxième. La filiale à Seattle sera donc la troisième en Amérique du nord, les deux premières étant au Canada."

Dédiée à des activités commerciales et au parachèvement d'aérostructures, la filiale de Seattle comptera une quinzaine de personnes. Les concurrents américains du groupe français sont Spirit AeroSystems et Triumph Group, qui dépassent tous deux 3 milliards d'euros de chiffres d'affaires annuels.

Stelia poursuit par ailleurs sa stratégie "best cost" avec des filiales en Tunisie et au Maroc, où une nouvelle usine vient d'être livrée. Une stratégie assumée :

"Quand on crée un emploi au Maghreb, on crée un emploi en France. En effet, quand on répond à un appel d'offres, il y a trois 'morceaux' : on regarde ce que l'on a intérêt à conserver en France (le cœur de métier), ce qu'il faut faire fabriquer dans nos filiales low cost (les pièces plus banales et moins technologiques), et ce qu'il vaut mieux sous-traiter. C'est cette combinaison qui fait que l'on est bon au niveau technologique et économique. Tout faire en France n'est pas compétitif, tout faire en low cost n'est pas possible et nos syndicats l'ont compris."

Une supply chain "pas mature"

Pour Cédric Gautier, l'avantage concurrentiel de Stelia est évident : il tient dans sa bonne performance industrielle : "on se démarque par une fiabilité qui, dans l'aéronautique, n'est malheureusement pas à un niveau suffisant. Nous voulons offrir au client un confort de livraison à l'heure avec un bon niveau de qualité. C'est pour cela que l'on se permet de vendre plus cher que la concurrence."

Dans l'industrie aéronautique en effet, on estime qu'une pièce sur 5 n'est pas livrée à l'heure. Un état de fait qui ne réjouit pas l'industriel : "C'est affolant. Nous-mêmes en tant que rang 1 sommes confrontés aux retards de nos fournisseurs. On arrive au final à une OTD (On Time Delivery) de 95-98 % mais cela nous coute beaucoup d'argent. C'est la preuve de l'absence de maturité industrielle de notre supply chain."

Avec plus de 2 000 fournisseurs enregistrés - beaucoup trop selon Cédric Gautier- Stelia souffre également du manque d'ETI :

"Les entreprises sont trop petites, leur masse critique est insuffisante, elle ne peuvent pas innover, ni investir dans le low cost. De plus en plus d'entre elles sont proches du dépôt de bilan. Il y a un réel besoin de consolidation du secteur. La mutation est en route mais elle n'est pas assez rapide !"

Pour gérer cette supply chain, Stelia s'appuie sur des ETI comme Figeac Aero, Mecachrome ou Lauak, mais s'est également organisée en interne : " les métiers liés aux méthodes de production, à la qualité, aux traitement des difficultés techniques, sont indispensables. On a l'habitude dans l'industrie de valoriser les métiers de bureaux d'étude et de production, mais les métiers d'ordonnancement et de planification sont aussi fondamentaux. On voit que la supply chain craque de partout et à chaque fois le diagnostic est le même : insuffisance de préparation, de staffing, de process, de méthodologie."

Stelia s'efforce donc de faire de la pédagogie auprès de sa supply chain, parfois en envoyant des équipes au sein des usines :

"Notre rôle est de faire comprendre à nos fournisseurs que ce n'est pas parce que ça a fonctionné comme ça pendant 30 ans que ça va continuer. Ceux qui pensent comme ça sont morts".

Recrutements

Stelia recruter en ce moment plus de 400 personnes en France, dont 95 % en CDI. Il s'agit de postes en production, bureau d'études, gestion de la supply chain, responsables de programmes et financiers. Confronté comme beaucoup de concurrents à des difficultés dans ses recrutements, Cédric Gautier sort le grand jeu :

"Airbus est très attractif, certes, mais nous offrons une entreprise à taille humaine, plus agile, moins hiérarchique, où il est plus facile 'accéder aux responsabilités".

Une entreprise qui par ailleurs disposera bientôt d'un siège social flambant neuf. Stelia fait en effet construire à Colomiers un bâtiment de plus de 15 000 m2 de bureaux, avec 650 places de parking et un restaurant d'entreprise de près de 1 100 m2. Livraison prévue en 2018.

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