L'après Sanofi à Toulouse : ce que propose le nouveau bioparc

Richard Alonso est le nouveau directeur du bioparc de Sanofi à Toulouse. Depuis que le géant pharmaceutique a retiré sa R&D de Toulouse, cet espace de 20 hectares situé au cœur de l'Oncopole a vocation à accueillir des entreprises du secteur de la santé, qu'elles soient locales ou internationales. Véritable VRP du bioparc, ce scientifique de formation vante un lieu "unique en France" de part la qualité de ses infrastructures. Entretien.
Richard Alonso, directeur du bioparc Sanofi Toulouse.

Vous êtes directeur du bioparc Sanofi à Toulouse, une zone d'activité dédiée à la santé. Quelles sont vos missions ?

Je suis directeur du site, en charge de l'exploitation, de la maintenance et du bien vivre pour tous les résidents de cet espace (aujourd'hui principalement occupé par Evotec, NDLR). C'est ce que l'on trouve sur tous les sites R&D Sanofi de France. Mais on parle aussi de bioparc parce que c'est un site qui a vocation à mettre à disposition des locaux et équipements à des entreprises extérieures à Sanofi. Je suis donc à la fois le directeur du site et responsable de la mise en place et du développement du bioparc.

Quelle est la surface qui peut être louée à d'autres entreprises ?

Aujourd'hui, le site représente 68 000 m2 de surface utile, et environ 20 bâtiments. Il y a 40 000 m2 de surface louable, dont la moitié est occupée par notre partenaire le plus important, Evotec. Il reste donc environ 20 000 m2 de laboratoires et de bureaux.

Comment attirer les biotechs sur le bioparc ? Certaines pointent déjà un loyer trop élevé.

Dans l'approche qui est la mienne, j'essaie - et je dois faire preuve de pas mal de pédagogie - de lever un certain nombre de tabous, de mal-dits, ou de non-dits.

Le bioparc serait trop cher ? Non ce n'est pas vrai, le site n'est pas trop cher. Mais il faut savoir de quoi on parle : ce site abrite des infrastructures haut de gamme de niveau mondial. Vous ne trouverez pas beaucoup de labos en France de cette qualité là. Vous ne trouverez pas non plus beaucoup de zones de pharmacologie de ce niveau là. Ce sont des infrastructures de qualité top niveau. Donc le loyer que l'on demande est pleinement aligné sur le benchmark français, et pas seulement le benchmark toulousain.

Ensuite, il y a les services qui sont inclus dans les charges locatives. Ce sont des services destinés à une approche "all inclusive". Quand une entreprise vient s'installer ici, nous faisons tout pour que le chef d'entreprise et ses scientifiques ne se concentrent que sur leur cœur de métier. Ils n'ont pas à s'occuper de l'environnement technique et logistique qui est nécessaire à la vie d'un labo. On s'en occupe pour eux. Ils disposent aussi d'espaces de réunions et d'auditorium magnifiques.

Vous ne visez donc pas forcément les startups. Quelle est votre cible ?

Effectivement, notre cible n'est pas la startup de pépinière. Nous visons les PME, les entreprises matures, voire les grosses PME, qui ont la solidité pour arriver dans ce type de laboratoires. Nous souhaitons attirer des entreprises de Toulouse, de France et du monde. Les services que nous proposons permettent à des entreprises de rentrer dans une phase de croissance, et c'est en cela que le bioparc se différencie de la majorité des bioparcs en France. Il se rapproche davantage de certains modèles européens comme Cambridge, Nottingham, ou Lund, en Suède. Il n'y a pas ce type de modèle en France, nous sommes les premiers. Nous ne sommes pas un incubateur ou une pépinière.

Alors bien sûr, les chefs d'entreprise qui viennent nous voir sont sur la défensive et se disent "je ne pourrai jamais m'offrir ces services". Mais après une heure de discussion, en comparant tous les coûts cachés qu'ils ont aujourd'hui dans leurs locaux, ils nous disent que ce n'est pas si cher que cela.

Le bioparc est né après le départ de Sanofi de Toulouse ?

Sanofi n'est pas partie de Toulouse, même si il n'y a plus de R&D. Sanofi a son drapeau sur Toulouse et le gardera. Le site appartient à Sanofi, ainsi que les infrastructures. Il est plus juste de dire que le bioparc est né à l'arrivée d'Evotec, il y a à peu près un an. Les premiers mois ont été consacrés à installation d'Evotec dans les locaux de Sanofi. L'équipe que je structure aujourd'hui a vocation à passer à la deuxième étape : ouvrir des locaux à d'autres entreprises qu'Evotec. Je suis assez confiant pour dire que d'ici quelques mois nous aurons de bonnes surprises.

Que cherche Sanofi en accueillant des entreprises extérieures au groupe ?

La stratégie de Sanofi n'est pas de développer une activité foncière. Nous ne sommes pas un bailleur. Nous ne sommes pas non plus une association caritative, notre vocation n'est pas d'ouvrir portes et fenêtres à toutes les entreprises à titre gracieux. L'intérêt pour nous est de bien travailler avec l'écosystème local, qu'il s'agisse de laboratoires publics (nous travaillons avec l'Inserm) ou d'entreprises privées. Notre objectif est de repérer la pépite de la région et de lui proposer des partenariats. Tout est possible.

Combien y a t-il de sociétés aujourd'hui sur le bioparc et combien comptez-vous en attirer ?

Il y a déjà 5 entreprises dans les locaux, notamment Dexter, une entreprise spécialisée dans le bigdata, qui à mon avis est une success story du bioprac. Nous avons 10 prospects actuellement en contact. À terme, nous aurons probablement des entreprises de taille moyenne, qui occuperont des surfaces de 300-400 m2, on peut donc parler d'une vingtaine d'entreprises. Mais mon ambition est d'avoir ici des entreprises beaucoup plus importantes, avec locaux entiers et des plateaux de plus de 1000 m2. On ne va pas trouver ça à Toulouse, il faudra aller les chercher. Si un deuxième Evotec veut s'installer ici, il est le bienvenu !

Les entreprises qui s'installeront ici seront forcément des biotechs ?

Non. Notre stratégie est de développer un campus, un écosystème, avec des entreprises qui soient là en support pour le développement des sociétés de santé. Par exemple des entreprises spécialisées en ingénierie financière, ou en développement d'essais cliniques, qui pourront intervenir avec les biotechs présentes et faire du B to B. Il est important qu'elles travaillent sur un site commun. En effet la communication, l'échange dans les espaces de convivialité, feront que demain des contrats pourront se faire entre entreprises. Je crois au fait qu'un certain nombre de découvertes se feront autour de la machine à café. Notre stratégie s'imbrique ainsi parfaitement avec celle de l'Oncopole, avec qui nous travaillons étroitement.

 Si vous êtes les seuls en France à proposer ces services, quelles sont les difficultés auxquelles vous êtes confronté ?

Ce n'est parce que on est dans le très haut de gamme que ça va être facile. Une des difficultés majeures en France est que nos biotechs n'ont pas une solidité financière comparable à celle de leurs consœurs anglo-saxonnes. L'émergence de biotechs est difficile, que ce soit à Toulouse ou en France. L'écosystème toulousain est extrêmement dynamique, il y a un véritable investissement des collectivités, mais il va falloir sorti de Languedoc-Roussillon-Midi-Pyrénées et chasser au national et à l'international. Et si possible, chasser en meute. Nous avons déjà des contacts avec Barcelone. Mais aujourd'hui Toulouse n'est pas visible sur la scène mondiale en matière de santé. Il faut travailler son image.

Le bioparc héberge la chimiothèque de Sanofi et la chimiothèque nationale, c'est un atout ?

La chimiothèque est le joyau du bioparc. On parle d'un bâtiment haut de gamme, top niveau, qui abrite en son sein plus d'un million de molécules, qui sont le patrimoine chimique de Sanofi, son ADN. Ce patrimoine est géré par Evotec. La chimiothèque nationale, c'est autre chose : c'est une collection de molécules en provenance du CNRS et d'une vingtaine d'universités. Ce patrimoine va être localisé dans le bâtiment qui abrite la chimiothèque de Sanofi. Il sera géré par Evotec dans le cadre d'un contrat passé entre Sanofi et le CNRS pour permettre à Sanofi d'utiliser 30 000 molécules (sur les 65 000 de la collection NDLR). Cela souligne bien que Sanofi reste implantée sur Toulouse. Néanmoins, cela n'est pas un atout particulier pour attirer des entreprises : il n'y a pas besoin d'être implanté à Toulouse pour bénéficier de la chimiothèque.

Quand Sanofi a cédé sa partie R&D à Evotec, l'inquiétude a été vive à Toulouse pour les salariés. Aujourd'hui comment décrivez-vous le climat social ?

Je trouve un climat enfin apaisé à Toulouse. Les collaborateurs Sanofi qui ont rejoint Evotec sont pleinement opérationnels, et mes collaborateurs Sanofi bioparc ont un objectif : réussir la transformation.

 Certains syndicalistes de Sanofi évoquent "une coquille vide" en parlant du bioparc...

Comment peut-on parler de coquille vide quand la moitié des locaux sont occupés et quand, dans quelques années, ils seront totalement occupés ? Certes, il n'y a plus de R&D ici. Cela ne veut pas dire que c'est une coquille vide, je m'inscris en faux.

Comment avez réagi aux attentats du 13 novembre, en termes de sécurité sur le site ?

Nous avons réagi très vite et mis en place des mesures, dont je ne souhaite pas parler pour des raisons évidentes.

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.