Ingénierie aéronautique : pourquoi la multinationale Infosys s'implante à Toulouse

Depuis 2010, la SSII indienne Infosys a triplé son activité en France. Alors que ses activités avec Airbus augmentent considérablement depuis un an, Infosys (9 Md€ de chiffre d'affaires) investit à Toulouse pour renforcer sa position auprès de l'avionneur européen en inaugurant, mercredi 30 septembre, un centre de services à Blagnac. Entretien avec Éric Laffargue, directeur d'Infosys France.
Éric Laffargue, directeur d'Infosys France

Infosys dispose de centres de développement en Allemagne, en Pologne, en Angleterre. Pourquoi décider d'en installer un à Toulouse ?
J'avais pris la décision de regrouper les ressources sur trois pôles en France : Paris, Lille et Toulouse, en fonction de la présence de nos clients. Avec le développement de nos affaires en France, notamment avec Airbus depuis un an, il nous fallait un centre en France. Nous l'avons mis à Toulouse où nous avons un client important avec qui les choses se passent bien, et à qui nous voulons montrer que nous allons investir. L'ouverture de ce centre montre clairement notre volonté d'approfondir notre relation avec Airbus. Qui plus est, Toulouse dispose d'un bassin d'emplois riche à long terme et d'un potentiel avec d'autres clients dans la région. C'est un centre pour la France, mais dont nous pourrons nous servir pour le reste de l'Europe.

En quoi sera-t-il différent de votre bureau à Paris ?
Les compétences ne seront pas tout à fait les mêmes. À Paris, il s'agit de ressources commerciales, de relations clients et de gestion de projets. À Toulouse, il y aura beaucoup de compétences d'ingénierie et dans le développement technique des projets. On sera plus en production. Enfin, à Paris, nous allons faire nos projets chez nos clients. Ici, à Toulouse, ils seront menés dans nos murs.

Quelle part de l'activité toulousaine sera dédiée à Airbus ?
Aujourd'hui, la moitié du centre est dédiée à Airbus et l'autre aux autres clients. Airbus nous a soutenu dans ce projet car c'est notre client principal à Toulouse. D'ici, nous pourrons servir des clients ailleurs. Des employés de Toulouse travaillent pour Alstom par exemple. Cela n'est pas un problème car nos équipes sont habituées à travailler avec des gens basées dans un autre endroit.

Pourquoi vous rapprocher d'Airbus dans ce cas-là ?
Nous travaillions déjà à Toulouse dans les locaux d'Airbus ou dans des bureaux loués. Il fallait quelque chose de plus organisé.

C'est un investissement important pour Infosys ?
Infosys a la chance d'avoir été une entreprise très profitable. Nous avons zéro dette et 4 milliards de dollars en banque. Le fait d'investir des m2 n'est pas important sur le plan financier. Par contre, c'est une décision importante pour Infosys car notre entreprise croît beaucoup. En 2000, il y avait 5 000 employés, aujourd'hui 180 000. Quand on décide d'investir dans une ville, on va y grossir. C'est une décision à long terme. Notre volonté est que ce centre soit un point d'appui pour notre croissance.

Le fait qu'Airbus signe d'importants contrats en Inde favorise-t-il Infosys ?
Sven Kaesser, directeur de l'approvisionnement en information et technologie d'Airbus, lors de son discours pendant l'inauguration, a indiqué qu'ils avaient la volonté de diversifier leurs achats et de donner une place de plus en plus prépondérante à l'Inde. Lors de la visite du Premier ministre indien en avril dernier, il y a eu un engagement d'Airbus d'augmenter fortement les achats faits auprès d'entreprises indiennes. Il me semble que Sven Kaesser, dans son allocution, a parlé de passer de 500 millions de dollars à 2 milliards. Automatiquement, cela nous est profitable.

Quel pourcentage représente Airbus pour Infosys en France ?
Ce représente une part à deux chiffres de notre activité. Plus de 10 %. Je ne peux en dire plus.

L'an dernier, les sociétés d'ingénierie de la région toulousaine ont dû s'adapter à la baisse de leur activité avec Airbus. Dans ce contexte, ne craignez-vous pas la concurrence élevée sur ce secteur en tension ?
Le centre de Toulouse a été créé pour soutenir nos clients à travers toute la France. Nous avons également la capacité unique de réunir les innovations à travers notre expérience mondiale dans l'aéronautique. Cela nous aidera en période de ralentissement économique aussi bien qu'en période de croissance.

Quels autres secteurs visez-vous en vous installant à Toulouse ?
L'aéronautique en premier, et tout le secteur de la santé également où nous avons l'intention de croître. Nous commençons à y travailler mais c'est un secteur émergent pour nous en France. Cela peut concerner tous les systèmes de gestion financière, de logistique, de e-commerce, tout ce qui est lié à l'informatique. Nous avons des relations avec Sanofi par exemple.

Combien de personnes employez vous à Toulouse ?
Actuellement, nous avons 90 personnes dont 30 embauchés localement. Ils sont souvent sur des projets chez les clients. Notre volonté est de continuer à croître. Il y a 100 places dans le centre. On peut imaginer être à 200-300 salariés à l'avenir. Nous avons actuellement plus de 400 salariés en France.

Vous êtes aussi responsable du centre d'Infosys à l'Île Maurice. À quoi ce centre est-il dédié ?
Ce centre, qui vient d'être rattaché à la direction France, compte 50 salariés et peut accueillir 100 personnes. À l'Île Maurice, une majorité de la population est bilingue et d'origine indienne. Nos collaborateurs son bi voire triculturels. Cela nous permet de répondre aux clients qui nous demandent de développer des projets en français et de les déployer dans des pays non francophones. Cette stratégie va nous permettre d'aborder des projets pour des clients français mais avec une connotation internationale.

Vous êtes arrivés en 2010 à Infosys France. Cinq ans plus tard, vos objectifs sont-ils atteints ?
Mon objectif était d'accélérer ce qui se passait en France, comme doit le faire mon homologue en Allemagne. Nous avons plus que tripler notre chiffre d'affaires en 3-4 ans. Notre accélération est plus forte que la croissance générale d'Infosys. Nous avons le même type de résultat en Allemagne. Infosys a décidé d'investir dans les pays à fort potentiel avec une culture forte comme le Japon, l'Allemagne et la France, avec une direction locale. De nombreux pays n'ont pas de direction propre. C'est une reconnaissance de la différence culturelle.

Quels sont les objectifs à venir ?
Nous devons contribuer à l'accélération en Europe. Nous avons des objectifs importants. Aujourd'hui, Infosys fait 9 milliards de dollars de chiffre d'affaires globalement et veut doubler ce résultat d'ici à 2020. La contribution de la France doit plus que doubler. En Europe, les marchés d'Infosys sont par ordre d'importance la Grande-Bretagne, l'Allemagne et la France.

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