Métro, Parc des expos, Sivens : les professionnels des travaux publics veulent la relance des chantiers "structurants"

Les professionnels des travaux publics de Midi-Pyrénées s'inquiètent une nouvelle fois de la baisse des appels d'offres lancés par les collectivités locales de la région. La FRTP affirme que 87 % des entreprises du secteur ont un carnet de commande inférieur à 6 mois et demande aux pouvoirs publics de relancer les investissements.

Les professionnels des travaux publics de Midi-Pyrénées s'alarment de la baisse de leur activité, qui s'est accentuée ces derniers mois. Le chiffre d'affaires des travaux publics en Midi-Pyrénées, qui s'élève aujourd'hui à 1,78 milliard d'euros, a diminué de 11,2 % depuis 2007 et de 8,9 % entre 2013 et 2014. Selon la fédération régionale des travaux publics de Midi-Pyrénées (FRTP), 87 % des entreprises du secteur ont un carnet de commande inférieur à 6 mois.

L'emploi dans la région souffre de cette chute de l'activité, puisque la profession connaît une baisse des ses effectifs de 17,5 % depuis 2007 et de 6,1 % entre 2013 et 2014. Désormais, les entreprises de travaux publics emploient 13 000 personnes en Midi-Pyrénées.

Explosion de l'activité partielle

En plus de cette réduction des effectifs, les entreprises du secteur ont de plus en plus recours à l'activité partielle. Ce dispositif est une aide de l'État pour les entreprises contraintes de réduire leur activité face à des circonstances exceptionnelles, qui a été facilité en septembre dernier par la Direccte (service de l'État en charge de l'emploi notamment). Ainsi, plutôt que d'avoir à licencier des salariés, l'employeur peut réduire leur temps de travail et préserver ainsi ses emplois. Pour cela, l'employeur bénéficie d'une allocation d'activité partielle de l'État. En contrepartie, il doit verser à ses salariés une indemnisation des heures dites chômées. Sur les 5 derniers mois, 1,2 million d'heures d'activité partielle a été sollicité par les entreprises en Midi-Pyrénées.

"Cela représente un coût de 9 millions d'euros pour l'État qui pourraient être investis ailleurs", déplore Gilles Abraham, délégué régional des Canalisateurs de France en Midi-Pyrénées, et membre de la FRTP.

À titre de comparaison, entre début 2009 et septembre 2014, seulement 420 000 heures avaient été utilisées.

Une conjoncture défavorable

Selon la FRTP, cette baisse de l'activité est la conséquence de trois facteurs.

"Il y a un alignement de planètes qui nous est défavorable !", s'exclame Pascal Enjalbert, vice-président FRTP et président du Syndicat professionnel de l'industrie routière de Midi-Pyrénées.

Première explication avancée :  la baisse des dotations de l'État imposée aux collectivités territoriales qui empêche la réalisation de nouveaux investissements publics.

D'autre part, la frilosité des collectivités à lancer de nouveaux appels d'offres s'expliquerait également par les réformes territoriales en cours. Selon la FRTP, ces réformes retiennent les élus de lancer de nouveaux projets, tant le transfert de compétences et de fonds entre les collectivités est incertain.

Enfin, l'enchaînement des élections municipales, départementales et bientôt régionales, avec parfois des alternances de majorités, expliquerait la baisse des appels d'offres.

"Quand il y a un changement de majorité, les nouvelles équipes remettent en question tout ce qui a été fait précédemment", précise Pascal Enjalbert.

Les professionnels tentent de se mobiliser

La FRTP a mis en place l'opération "Relance de l'investissement public" à travers laquelle elle conduit plusieurs actions. La première est d'avoir identifié 400 projets bloqués en France.

"En Midi-Pyrénées, on a recensé 32 chantiers bloqués, pour des raisons financières ou administratives. L'objectif de cette liste était de trouver des chantiers qui pouvaient démarrer très rapidement pour sauvegarder le plus d'emplois possible", explique Gilles Abraham.

Le plus emblématique est le barrage de Sivens, dans le Tarn. À Toulouse, il y a également plusieurs projets "bloqués" comme le Parc des expositions de Beauzelle : "Les lots sont arrêtés, les appels d'offres sont prêts à être lancés, on peut donc s'imaginer que ce dossier peut démarrer", espère Pascal Enjalbert, qui évoque également le prolongement de la ligne B "qui devait se concrétiser" mais qui "peine à voir le jour".

"Le Parc des expos et le prolongement de la ligne B sont pourtant des projets qui faisaient partie des choix de Jean-Luc Moudenc durant sa campagne, avant qu'il ne soit élu", souligne-t-il.

"Aucun projet d'envergure"

Selon les professionnels du secteur, il n'y a plus de projets structurants de la part des collectivités. Le seul projet d'envergure reste une hypothèse : celui de la construction d'une troisième ligne de métro à Toulouse, qui demande des études et des démarches administratives complexes à long terme. "On ne pourra pas tenir 10 ou 15 ans, ou bien nous serons contraints de réduire les effectifs de manière plus drastique", s'inquiète Pascal Enjalbert.

"Un tunnel pour un métro, cela doit s'amortir sur plusieurs décennies, parfois un siècle. La troisième ligne de métro conduit la collectivité à faire des choix très difficiles, et c'est en partie pour cela que le Parc des expositions de Beauzelle ne sort pas. Si une collectivité ne peut pas investir d'un seul coup, il y a d'autres moyens d'étaler le financement, comme le partenariat public-privé", précise Pascal Enjalbert.

"C'est l'opinion publique qui fait bouger les choses"

La FRTP, pour alerter les collectivités, a lancé début mars une charte pour - notamment - relancer l'investissement public local et maintenir les moyens consacrés à l'entretien des infrastructures. Cette charte a été adressée aux élus locaux. Pour l'instant, aucun n'y a répondu.

"Sur les dossiers bloqués, il n'y a que l'opinion publique et le ressenti de la population qui fera bouger les choses", estime Gilles Abraham.

Ainsi, une application téléphone permettra aux usagers de signaler à sa collectivité tout dysfonctionnement en matière de réseau et d'infrastructure. Une initiative menée conjointement par l'Observatoire régional de la qualité de service des infrastructures (Orquasi) et la FRTP.

"Les investissements qui ne sont pas faits aujourd'hui se répercutent sur la qualité des infrastructures. Il faudra de toute façon rattraper le retard et le coût sera encore plus élevé demain", conclut Gilles Abraham.

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