Polémique : Joël Bertrand retire sa candidature à la présidence de l'Université de Toulouse

Joël Bertrand, directeur général délégué à la science du CNRS, a retiré "avec regret" sa candidature à la présidence de l'Université de Toulouse après une audition qu'il juge "contraire à toute déontologie". Soutenu par l'actuelle présidente Marie-France Barthet, son concurrent Philippe Raimbault, directeur de Sciences Po Toulouse, reste donc seul en lice. L'élection aura lieu le 1er juillet, avec en toile de fond, la perte de l'Idex le 30 avril dernier.
Joel Bertrand (à gauche) a retiré sa candidature. Philippe Raimbault (à droite) sera donc le prochain président de l'Université de Toulouse.

"Avec regret et détermination, j'ai retiré ma candidature." Joël Bertrand, directeur général délégué à la science du CNRS, n'est plus candidat pour présider l'Université de Toulouse (aussi appelée la Comue). Reçu le 6 juin en commission d'audition par le Conseil des membres élargi (qui rassemble les présidents actuels des différentes universités et des personnalités extérieures, NDLR), il a été classé en deuxième position derrière son concurrent Philippe Raimbault. Un avis consultatif qui laisse le chercheur amer :

"Le conseil des membres a préféré travailler avec mon concurrent qu'avec moi-même. C'est son choix. Ils ont préféré la continuité à la rupture. Pour ma part, je pense qu'ils se trompent car la continuité ne convient pas pour reconquérir l'Idex. On dirait qu'ils n'ont pas compris qu'ils ont perdu l'Idex. Je le dis en souriant : on ne change pas une équipe qui perd..."

Pour rappel, cette élection à la tête de l'Université de Toulouse intervient dans un moment particulier pour le monde universitaire toulousain : le 30 avril dernier, l'université fédérale de Toulouse s'est vue retirer le label Idex, qui lui garantissait un financement de 25 millions d'euros annuels à destination, notamment, de ses laboratoires de recherche. Un choc qui remet en cause la stratégie toulousaine en matière de périmètre d'excellence et de gouvernance, dans un contexte de compétition mondiale entre les universités. Le futur président de la Comue aura notamment pour mission de hisser Toulouse aux meilleures places des classements internationaux, celui de Shanghai particulièrement.

"Des conditions d'audition contraires à toute déontologie"

Joël Bertrand, qui se considérait comme le candidat de la rupture par rapport à l'actuelle présidente Marie-France Barthet, a fait campagne sur les thèmes de l'internationalisation de l'Université de Toulouse et de la reconquête de l'Idex.
Il dénonce "des conditions d'audition contraires à toute déontologie" :

"Marie-France Barthet, qui soutient Philippe Raimbault, n'aurait pas dû présider cette commission d'audition. Par ailleurs, Philippe Raimbault a assisté au conseil d'administration de l'Université de Toulouse qui a eu lieu le 3 juin et qui préparait l'élection du 1er juillet. Moi je n'y étais pas et, par conséquent, nous n'étions pas au même niveau d'information, ce qui m'a desservi. Ils pratiquent l'entre soi."

Joël Bertrand, candidat soutenu par plusieurs directeurs de laboratoires, assure qu'il y a "une amertume au CNRS", mais qu'"il faudra travailler avec Philippe Raimbault".

 Philippe Raimbault, seul en lice

 Philippe Raimbault, désormais seul candidat, réfute ces accusations :

"J'étais effectivement au CA du 3 juin en tant que directeur de Sciences Po. Nous avons lu un courrier qui précisait les modalités de l'audition et que Joël Bertrand avait également reçu. Ce courrier précisait que nous aurions une demi-heure d'exposé et trois-quarts d'heure de questions, et que seuls les membres extérieurs pouvaient poser des questions. Nous étions donc au même niveau d'information. Par ailleurs, Marie-France Barthet n'a pas pu influencer les entretiens puisqu'elle ne pouvait pas poser de questions."

L'actuel directeur de Sciences Po Toulouse "regrette" néanmoins que "le processus n'aille pas jusqu'au bout et que le CA ne puisse pas se prononcer sur deux projets, à ce moment crucial de son histoire".

Un processus "un peu démesuré pour seulement deux candidats"

Mise en cause, la présidente de l'Université de Toulouse Marie-France Barthet n'était pas joignable ce mardi 14 juin. Olivier Simonin, président de l'INP Toulouse et membre du Conseil des membres, a assisté à la commission d'audition : "Tout s'est déroulé selon les règles et de manière parfaitement déontologique. Des personnalités extérieures de haut niveau ont élaboré des questions, qui ont été posées à l'identique aux deux candidats. Le fait que la présidente de l'Université participe au processus du choix de son successeur ne me paraît pas contraire à la déontologie, cela se fait couramment dans des recrutements aussi importants", explique-t-il.

L'avis de la commission d'audition est consultatif et est communiqué au Conseil d'administration (composé de 80 personnes environ), qui votera le 1er juillet prochain.

"On peut se demander pourquoi il y a une commission d'audition puis un vote au CA alors qu'il n'y a que deux candidats. Cela paraît un peu démesuré", concède le directeur de l'INP. L'explication relève de contraintes administratives :

"C'est ce qui arrive quand on écrit les statuts d'une entité qui n'existe pas encore ! Lorsque les statuts de la Comue ont été rédigés il y a un an et demi, on ne savait pas combien de candidats il y aurait, et on ne connaissait pas le contexte. Par exemple, nous avions réservé trois jours rien que pour la commission d'audition, au cas où il y aurait une dizaine de candidats ! Finalement, il n'y en a eu que deux."

Au final, il n'y a même qu'un seul candidat. Philippe Raimbault est donc assuré d'être le prochain président de l'Université de Toulouse.

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Commentaires 2
à écrit le 15/06/2016 à 16:50
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Y aurait-il encore des comportements intelligents dans la sphère dirigeante, quelle qu'elle soit ? A l'évidence non !... En effet, pour éviter toute suspicion et polémique, dans la nomination du nouveau Président de l'universite de Toulouse, la "Comu...

à écrit le 14/06/2016 à 23:45
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Ils pratiquent l'entre-soi et ainsi créent une ambiance puante et sclérosante à tous les étages. C'est çà l'université de Toulouse. Que le CNRS s'en éloigne, il ne s'en portera que mieux. Aucune déontologie dans l'administration universitaire toulo...

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