Val Tolosa : un centre commercial déjà dépassé face aux nouveaux modes de consommation ?

Le projet de centre commercial Val Tolosa est-il dépassé avant même sa construction ? Pour certains élus et le collectif d'opposants Non à Val Tolosa, ce site est "démesuré" par rapport à la demande réelle, d'autant que les grandes surfaces subissent une baisse de la fréquentation et sont confrontées à la progression du e-commerce.
Plan d'architecte du projet de centre commercial Val Tolosa.

"Val Tolosa, c'est le dernier des Mohicans !", assène sans hésitation Claude Raynal, à l'occasion de ses vœux à la presse. Pour le sénateur et leader de l'opposition socialiste au sein de Toulouse Métropole, on a affaire au "dernier projet de centre commercial de cette ampleur en France, au milieu de la pampa, alors que des surfaces de 4 000 m2 se sont développées dans les communes environnantes".

Lancé il y a 15 ans, le projet Val Tolosa prévoit l'implantation, sur le plateau de la Ménude à Plaisance-du-Touch, de 63 250 m2 de surface de vente, un hypermarché, 150 boutiques, un grand magasin de 9 000 m2. Cela en ferait l'un des 10 plus grands centres commerciaux de France. Montant de l'investissement : 350 millions d'euros. Les travaux devaient commencer en 2013 pour une ouverture du centre commercial en 2016. Mais, dès l'obtention du permis de construire en 2009, le promoteur immobilier, Unibail Rodamco, a été confronté à l'hostilité des riverains. En septembre 2015, le collectif Non à Val Tolosa a entamé un blocage permanent du chantier pour dénoncer ce projet considéré comme "un grand projet inutile".

baisse de fréquentation
des centres commerciaux

Premier grief opposé à ce projet, élus et habitants remettent en cause l'utilité même d'une surface commerciale de cette ampleur dans l'agglomération toulousaine.

"Il s'agit d'un projet vieillissant, vieux de 15 ans, qui n'est plus en adéquation avec les nouveaux modes de consommation. Depuis le lancement du projet, 750 000 m2 de nouvelles grandes surfaces ont été créées dans l'agglomération toulousaine", a martelé le 12 janvier dernier Georges Méric, le président du Conseil départemental de Haute-Garonne.

De même pour Jean-Jacques Bolzan, en charge des politiques commerciales et artisanales à la Mairie de Toulouse et à Toulouse Métropole, l'agglomération compte suffisamment de centres commerciaux. Entre Blagnac, Portet-sur-Garonne, Roques-sur-Garonne, Labège, il existe des zones "bien réparties sur le territoire, à moins de quinze minutes de voiture pour chaque habitant de l'agglomération".

La maire de Colomiers (PS) Karine Traval-Michelet fait le même constat :

"Ce projet était déjà démesuré à l'époque, mais c'est encore plus le cas aujourd'hui. Les habitants disposent de centres commerciaux et de petits commerces de proximité. Les habitudes de consommation ont également changé avec le développement des achats sur internet. Il est évident que le projet ne peut rester en l'état, il faudra le redimensionner."

D'autant que, depuis 2008 et le début de la crise, les centres commerciaux sont en pleine décroissance. Ainsi, selon le Conseil national des centres commerciaux, depuis 7 ans, la fréquentation de ce type de magasins a chuté de 10 %.

"Cette baisse d'activité en termes de fréquentation et de chiffre d'affaires va bien au-delà de la conjoncture économique. Il existe un changement des habitudes de consommation, considère Philippe Moati, professeur d'économie à l'université Paris-Diderot et cofondateur du blog L'observatoire société et consommation (ObSoCo). Les centres commerciaux sont nés à l'époque des Trente glorieuses et ils sont aujourd'hui concurrencés par l'e-commerce. Cette tendance devrait s'accentuer car l'achat en ligne représente seulement 7 % de parts de marché actuellement en France. Déjà en surcapacité, certains centres commerciaux vont devoir fermer, un phénomène déjà observé aux États-Unis."

Si le constat paraît unanime, pourquoi les promoteurs continuent-ils lancer des projets toujours plus gigantesques ?

"Le temps d'obtenir toutes les autorisations, il faut 8 à 10 ans en moyenne pour qu'un centre commercial voit le jour. Mais ce n'est pas la seule explication, poursuit Philippe Moati. Comme les centres commerciaux sont moins attractifs, les professionnels cherchent à agrandir ou à ouvrir de nouvelles surfaces plus grandes et plus modernes pour rester compétitifs. C'est un peu la danse de fin de partie. Les promoteurs se ruent sur les dernières opportunités avant liquidation. On peut le remarquer notamment dans les zones en pleine croissance démographiques comme la région Languedoc-Roussillon-Midi-Pyrénées."

Un impact sur l'emploi contesté

Par ailleurs, les promoteurs immobiliers mettent en avant les emplois créés à l'occasion de la construction du centre. Le promoteur immobilier de Val Tolosa, Unibail Rodamco, prévoit la création de 3 000 emplois directs et indirects pendant la phase de construction et 2 000 emplois une fois les portes du centre commercial ouvertes. De plus, Unibail Rodamco a signé en février 2013 avec Pôle Emploi Midi-Pyrénées un partenariat qui vise à favoriser l'embauche des demandeurs d'emploi de la région. Contacté par la rédaction, le promoteur n'a pas donné suite à notre demande d'interview.

De leur côté, les opposants au projet contestent l'impact économique du projet :

"Les emplois créés seraient majoritairement précaires. L'expérience prouve ensuite que, pour 1 emploi créé par la grande distribution, 3 à 4 seraient détruits dans les cinq ans suivants. La carotte de l'emploi est un faux argument", estime le collectif Non à Val Tolosa.

Le recours des opposants contre le permis de construire du centre commercial devait être examiné le 12 janvier dernier mais il a été reportée par la Cour d'appel de Bordeaux sine die. Un médiateur a été nommé par l'État pour étudier l'impact environnemental du projet.

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Commentaires 2
à écrit le 28/01/2016 à 9:15
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Un projet totalement insensé lancé et maintenu par des élus irresponsables et dépassés par le contexte économique actuel. La région toulousaine est submergée par les grandes surfaces qui se vident de plus en plus, on peut le constater facilement en v...

le 26/01/2017 à 11:11
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Depuis des lustres le sénateur -maire et conseiller-général Claude Reynal est opposé à cette nouvelle surface. Depuis des lustres Claude Reynal à favorisé les extensions et implantations de grandes surface à Tournefeuille pour contrer les ambitions ...

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